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Enjeu agricole : terres fertiles ukrainiennes
L’Ukraine, acteur central du commerce mondial de blé, orge, maïs et des coproduits du tournesol, offre aussi une opportunité majeure pour l’agroalimentaire américain grâce à ses 33 millions d’hectares de terres parmi les plus fertiles au monde. Depuis le début des années 1990, les dirigeants ukrainiens auraient permis une forme de prédation des terres agricoles du pays. Les institutions financières occidentales pourraient poussé l’Ukraine à permettre à des capitaux privés d’investir dans l’achat de ses terres agricoles. Avant 1991, toutes les terres ukrainiennes appartenaient à l’État et étaient exploitées par des fermes collectives et publiques. Dans les années 1990, sous l’influence du FMI et d’autres institutions internationales, une grande partie des terres agricoles a été privatisée. Depuis 2014, la Banque Européenne pour la Reconstructions et le Développement (BERD), la Banque mondiale et le FMI auraient conditionné plusieurs prêts à l’ouverture du marché foncier ukrainien. Par exemple, le FMI aurait alloué plus de 20 milliards de dollars à l’Ukraine entre 2015 et 2018, sous condition de l’ouverture du marché foncier national.
Aujourd’hui, sur 4,3 millions d’hectares qui sont dédiés à l’agriculture industrielle de l’Ukraine, près de trois millions seraient contrôlés par une douzaine de grandes entreprises agroalimentaires. Toujours selon la même source, parmi les 10 premières entreprises contrôlant les terres agricoles en Ukraine, deux sont américaines. Bien qu’il ne menace pas la sécurité alimentaire du pays, le phénomène d’accaparement d’une partie des terres agricoles américaines par des acteurs étrangers pourrait pousser le gouvernement Trump à chercher des alternatives. L’achat de davantage de terres arables ukrainiennes de la part d’acteurs américains permettrait de renforcer encore davantage la sécurité alimentaire nationale tout en donnant accès à des terres à haut rendement agricole dans un contexte d’appauvrissement et de dégradations des sols en Amérique du Nord.
Pays de 38 millions d’habitants, l’Ukraine est fortement dépendante d’un soutien occidental fragile face à une Russie aux ressources naturelles abondantes, dont la population est plus de trois fois supérieure à son voisin. Dans ce contexte, l’Ukraine voit ses marges de manœuvre de plus en plus limitées. À l’inverse, les États-Unis, grands contributeurs de l’effort de guerre, se retrouvent en position de force pour tirer profit de cette situation. Entre négociations diplomatiques et pressions économiques, l’administration Trump pourrait bien façonner une relation asymétrique, où l’Ukraine se verrait contrainte d’échanger une partie de son potentiel économique contre un soutien militaire indispensable.
""""Métaux stratégiques et terres rares dans le viseur
La rivalité géopolitique entre les États-Unis et la Chine a placé les minerais essentiels au centre du programme de sécurité nationale de Washington. En effet, le contrôle quasi monopolistique chinois de nombreux minerais critiques, essentiels à l’industrie de défense, représente un risque pour la sécurité nationale des États-Unis.
Les réserves de métaux stratégiques et de terres rares en Ukraine attirent les convoitises américaines, car elles sont indispensables aux technologies modernes, aux systèmes de défense avancés, à l’aérospatiale, aux énergies renouvelables et à l’industrie manufacturière. D’après le sénateur Graham, les Ukrainiens « possèdent de 10 000 à 12 000 milliards de dollars de minéraux critiques… Ils pourraient devenir le pays le plus riche d’Europe. Cette richesse et ces ressources ne doivent pas tomber entre les mains de Vladimir Poutine et être partagées avec la Chine ». En effet, l’Ukraine possède d’importantes réserves de lithium et de titane, figurant parmi les plus significatives d’Europe. Le pays dispose également de gisements de cobalt et de nickel, des métaux essentiels dans le domaine des batteries ou de l’aéronautique. Enfin, l’Ukraine se distingue comme l’un des principaux producteurs européens de graphite naturel, une ressource clé pour de nombreuses applications industrielles. Un accord formel entre les États-Unis et l’Ukraine pour exploiter conjointement ces ressources permettrait aux Américains d’en bénéficier [YR2] tant sur le plan économique que sécuritaire.
Néanmoins, cette entreprise semble en partie compromise. Les avancées russes en territoire ukrainien amputent considérablement les estimations de réserves ukrainiennes. Selon certaines estimations « un peu plus de 6 000 milliards de livres sterling des ressources minérales de l’Ukraine, soit environ 53 % du total du pays, sont contenues dans les quatre régions que M. Poutine a annexées », ce qui réduit considérablement les marges de manœuvre ukrainiennes sur la question d’une future exploitation des métaux critiques du pays par les Américains.""""""
L'Homme succombera tué par l'excès de ce qu'il appelle la civilisation. ( Jean Henri Fabre / Souvenirs Entomologiques)