GillesH38 a écrit :
Il y a un probleme dans tes hypothèses, c'est que tu supposes que la répartion en fossiles est une donnée intangible, et que le niveau de vie s'adapte.
L'hypothèse est qu'on consommera les fossiles conventionnels au maximum de ce qu'on peut produire, ce qui me semble raisonnable à moyen terme vu les besoins des PVD.
Il y a un autre probleme, c'est que tu supposes qu'il suffit de fabriquer de l'énergie supplémentaire pour permettre la croissance. D'un certain coté, ça reproduit l'erreur de raisonnement (selon moi) des économistes libéraux, qui supposent que la croissance est une donnée intrinsèque, un besoin inhérent à une société, et qu'il suffit de l'alimenter par de l'énergie, à n'importe quel coût, pour que ça marche.
Je pense qu'il y aura de la croissance entre 2010 et 2050 globalement (pas forcément par personne), parce qu'on aura à peu près la même quantité de fossiles à notre disposition et qu'on fera forcément des optimisations. Je ne dis pas qu'on l'alimentera par de l'énergie à n'importe quel cout, il y a des limitations dont j'ai parlé, de flux d'une part, et bien sur de "cout" mais je pense que l'EROEI a beaucoup plus de sens là que le cout, surtout si on le calcule avec les règles de rendement des investissements actuels qui dévalorisent le futur par rapport au présent (et donc défavorisent les EnR).
J'ai une vision différente, sans doute influencé par mes connaissances des systèmes physiques. La croissance n'est jamais une solution stable d'un système physique ni une propriété inhérente au système. La croissance mesure un temps d'évolution d'un système hors équilibre, et n'existe que si on est HORS équilibre, c'est à dire que le système n'a pas encore atteint son état stationnaire. Pourquoi y a-t-il eu croissance des sociétés industrielles? parce que l'exploitation des énergies fossiles a fixé un état maximum stationnaire possible bien plus élevé que ce qui existait au départ. La croissance industrielle aura donc été l'évolution de la société vers cet état - mais elle aura été contrecarrée par le fait que les fossiles s'épuisant au fur et à mesure, cet état stationnaire asymptotique finira lui meme par redescendre, et quand les deux courbes se croiseront, la croissance s'arrêtera.
Sur le principe, je suis d'accord qu'améliorer l'utilisation des fossiles (la mitigation) conduit à élever le niveau moyen atteignable, et donc permet en théorie de reculer le moment où on l'atteint. Et d'ailleurs probablement ceci a déjà joué, on a sans doute gagné 10 ou 20 ans par rapport au gaspillage des années 70. Mais comme je disais il ne s'agit que de détails de la courbe à l'échelle historique. Le moment où la croissance s'arrêtera sera quelque part entre maintenant et 2050 (bien plus probablement entre maintenant et 2030 , voire 2020), après le détail peut dépendre des evenements historiques, des crises, etc... mais ça ne change pas le probleme de fond.
Bien sur que non, ca ne change pas le fond et je ne dis pas le contraire, je dis juste qu'ensuite on tendra vers le niveau que permettent les EnR et que ce niveau n'est pas fatalement très inférieur à celui des fossiles. Je pense en particulier, qu'en limitant l'usage des fossiles à celui de matières premières, et sans hypothèses farfelues sur le futur, les EnR permettent déjà avec les technos connues aujourd'hui un niveau assez proche du niveau atteint avec les fossiles.
Si ton argument est qu'il faut tout faire pour reculer au maximum le moment historique où la croissance s'arrêtera, je n'ai pas d'objection fondamentale à ça. Je remarque juste que ce n'est pas une notion révolutionnaire, et qu'un économiste libéral n'aurait aucune raison de penser autre chose. Mais en revanche, je dis que :
a) ça ne change pas fondamentalement l'évolution historique de notre société (croissance jusqu'à ce que les limites naturelles rendent impossible de continuer plus loin -incluant les efforts de mitigation), puis décroissance.
Non, pas forcément décroissance.
Ensuite si, ça change fondamentalement de la vision aujourd'hui en vigueur parce qu'on cesse d'appliquer la règle du rendement immédiat (et de la dévalorisation des investissements pour le futur qui ont un sens dans une société en croissance) pour trouver les règles qui optimisent dans une société en non-croissance.
b) ça ne conduira pas à une période de croissance zéro de longue durée, puisque la croissance zéro, tout comme le pic de production, tout comme le sommet de l'extension de l'Empire Romain , est une période contingente ou s'équilibre à peu près deux tendances contraire, celle qui pousse à la croissance et l'épuisement des ressources qui fait redescendre, équilibre qui ne peut etre que temporaire.
Tu repars de nouveau dans tes visions à très long terme qu'il ne sert à mon avis absolument à rien de discuter aujourd'hui parce que nous n'avons pas les éléments à notre disposition pour juger de l'état asymptotique EnR (nous en avons seulement un minorant), et que les mesures que je préconise permettent de rester en croissance >=0 au moins pendant 50 ans.
c) ...
Je n'ai pas tout compris. Est-ce que tu fais l'hypothèse là-dedans que les EnR ne seront jamais compétitives? Dans ce cas, je suis d'accord sur le fait qu'à très long terme il y aura décroissance. Mais la forme particulière de la courbe est importante pour nos descendants au moins. Si on peut amortir la décroissance avec des EnR à un niveau par exemple de -0.5% au lieu de -3%, alors ça laisse beaucoup plus de temps pour s'adapter (y compris pour atteindre une démographie compatible avec du 100% EnR dans cette hypothèse), et ça évite très certainement les crises les plus aigues. De toutes façons, je crois l'avoir déjà dit, pour moi c'est un pari gagnant-gagnant: on n'a rien à perdre à optimiser à moyen terme (à long terme si car on n'a pas assez de visibilité sur les valeurs numériques de la fonction à optimiser) et peut-etre tout à gagner.
en fait ton argument est qu'il n'est pas difficile d'augmenter très sensiblement la productivité des fossiles - sauf que si tu as raison , !l n'y a pas de raison que ça ne se produise pas spontanément, tout comme les fossiles ont augmenté très sensiblement la productivité du travail humain, et c'est justement bien pour ça qu'ils se sont développés de manière fulgurante ...
Je redis qu'il y a aujourd'hui un frein artificiel au développement des EnR par rapport aux fossiles qui est la dévalorisation du futur par rapport au présent dicté par des règles économiques adaptées à une période de croissance.
Mais une fois que tu auras reculé le pic de 20 ans, alors que diront les écologistes au moment du nouveau pic 20 ans après? qu'on peut encore faire des efforts? et encore 20 ans après ?
Les écologistes je ne sais pas, prière de ne pas faire l'amalgame entre mon point de vue et celui des écologistes (qui n'est sans doute pas uniforme). Je préconise que périodiquement, on réexamine la situation à la lumière des connaissances acquises (sur les disponibilités en fossiles, les capacités des EnR, etc.) et qu'on optimise avec une vision à moyen terme.
Bon tout ça c'est toujours de la discussion générale dans le vague, j'ai déjà dit que je ne voulais plus perdre de temps à en discuter. Parlons des chiffres maintenant.
le calcul était valable pour la France en tenant compte de l'électricité nucléaire non utilisée la nuit. Mais en réalité, cette électricité peut aussi etre stockée par exemple en la vendant aux suisses qui la stocke dans leurs retenues. Si au niveau français, ça n'augmente pas le besoin en centrale, en revanche l'électricité n'est plus vendue et donc va bien falloir ailleurs la compenser ! si les suisses finalement vendent moins d'électricité hydraulique aux allemands pour compenser les moments où les éoliennes sont à l'arret, il faudra finalement que des derniers dépensent un peu plus de charbon. Donc finalement ces voitures seront bien au charbon. Est ce que c'est plus intéressant que de les faire marcher au CTL ? pas évident. Est ce que globalement l'intensité énergétique du PIB aura diminué? je vois pas pourquoi, si c'etait le cas pourquoi ne fait-on pas deja des voitures au CTL. Bref le bilan tout compris n'a aucune raison d'etre positif pour l'économie. Ni pour le CO2 d'ailleurs, on tombe sur l'autre probleme que j'ai soulevé : c'est pas parce qu'on économise du CO2 quelque part que ça empeche le consommer ailleurs, ou plus tard.
Est-il vraiment nécessaire de poster comme si j'ignorais tout ça?
D'ici que ça se fasse (avoir une portion significative de notre parc automobile individuel en électrique), on aura plus que le temps de développer des EnR et je doute fort que le problème énergétique à résoudre soit de trouver quelle source injecter pour pomper de l'eau, bien au contraire le problème sera de stocker toute cette énergie variable. Pour rappeler les ordres de grandeur, on devrait produire *cette année* en éolien en France de l'ordre de 10 TWh (et la 1ère limite qu'on rencontrera c'est la variabilité), précisément le chiffre que j'indiquais pour les transports électrifiés en France. Je n'ai plus le post de sceptique sous les yeux, mais 10TWh c'est 1e10kWh soit disons 0.5e11 km parcourus en véhicule électrique de 1000kg ou encore 1500km pour 30 millions de véhicules en 1 an, donc 4 à 5000km pour une sceptique-mobile. Alors non ces véhicules ne seront surement pas des électriques au charbon.