Pour le recyclage des panneaux photovoltaïques, Veolia se fait une place au soleil
Olivier Cognasse Usine Nouvelle le 26/06/2018
Reportage Le groupe français Veolia inaugure la première unité de recyclage en Europe dédiée aux panneaux photovoltaïques de type "silicium cristallin" sur son site du Rousset. Un marché en devenir confié par l’éco-organisme PV Cycle.
Le 5 juillet sera inaugurée la première unité de recyclage dédiée aux panneaux photovoltaïques.
Au sommet d’une colline sur la commune de Gardanne (Bouches-du-Rhône), un immense champ de panneaux photovoltaïques situé sur un ancien terril. Le parc des Sauvaires s’étend sur une surface de 17 hectares accessible par un chemin caillouteux, où 38 200 panneaux solaires représentant une puissance de 9,36 MW sont exploités depuis 2013 par la société Urbasolar. Le contraste est saisissant avec la centrale thermique bien visible dans la vallée et ses tas de charbon restés figés depuis la fermeture et en attendant sa transformation en centrale biomasse.
Pour Urbasolar, ce site est très rentable à 10 centimes le KW/h le tarif de rachat pendant 20 ans, le temps prévu pour une utilisation maximale de ces panneaux d’une capacité de 250 W contenant chacun 60 cellules photovoltaïques. Ensuite, l’investissement bien amorti, les panneaux conserveront encore au moins 85% de leur capacité. Autant dire que leur remplacement n’est pas prévu, hormis pour les quelques panneaux cassés chaque année, notamment par des oiseaux lâchant des pierres ou de la grêle.
Un marché en devenir
Dans ces conditions, le marché du recyclage de panneaux solaires est encore balbutiant - à part pour les saisies en douane ou les unités défectueuses ou cassées. Mais il progresse rapidement : 53 000 tonnes en 2016, 84 000 tonnes en 2017 pour le marché français. Et les projections au niveau mondial parlent de plusieurs dizaines de millions de tonnes d’ici 2050 dans le monde. Il était donc temps de créer la filière et l’éco-organisme PV Cycle a confié à Veolia ce chantier. Ce dernier a investi 1 million d’euros pour ouvrir une unité dédiée aux panneaux photovoltaïques de type "silicium cristallin" (95 % du marché) sur son site du Rousset (Bouches-du-Rhône).
Un site qui "traite 21 000 tonnes de déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE), surtout du petit électroménager, de l’informatique et des équipements électriques, mais aussi 1000 tonnes d’écrans plats et cathodiques", détaille Gilles Carsuzaà, le directeur général de Triade Electronique, la filiale déchets DEEE de Veolia. Le 5 juillet, il inaugure cette activité qui a commencé à recycler les premiers panneaux depuis quelques jours. L’objectif est de recycler 1000 à 1200 tonnes par an dans un premier temps avec une équipe de trois personnes et de passer à trois équipes avant trois ans. Un mois et demi ont été nécessaires pour installer l’ensemble des équipements. A l’extérieur, non loin du cimetière des réfrigérateurs qui attendent leur démantèlement, un stock de panneaux photovoltaïques dans un triste état à l’entrée d’un vaste bâtiment qui parait presque vide. Au fond, quelques machines et des sacs pour une "première européenne : le recyclage des panneaux cristallins avec la volonté de dupliquer ce process dans d’autres régions du monde", explique Gilles Carsuzaà.
95% du poids d'un panneau recyclé ou valorisé
A leur entrée sur le site, les panneaux sont pesés et identifiés, puis stockés à l’intérieur. La première opération consiste à ôter l’encadrement en aluminium, les boîtiers de raccordement et les câbles de connexion. Les opérateurs sont aidés par un manipulateur qui déplace le panneau avec quatre ventouses et enlève le cadre. Les panneaux sont stockés ensuite selon leur taille, avant d’être saisis par un bras robotisé qui alimente une cisaille pour les découper à la bonne taille, avant qu’ils passent sous les fourches caudines des broyeurs et cribleurs.
Les matières tombent ensuite dans des sacs selon leur nature (verre, plastique, silicium) et leur granulométrie. "Nous recyclons et valorisons 95 % du poids d’un panneau et 5% sont incinérés comme déchets, annonce Frédéric Ivars, directeur du site. Mais plus de 60% du poids provient du verre et 10 à 15% de l’encadrement", précise-t-il. Les process utilisés par Veolia permettent de séparer les différents matériaux pour les rendre propres et les revendre. C’est le cas du verre essentiellement cédé à Saint-Gobain. "On veut sortir du verre qui ne soit plus un déchet mais un véritable matériau", affirme Frédéric Ivars. D’autres éléments sont envoyés sur les sites du groupe comme les boîtiers qui restent au Rousset, d’autres à Castelnau-le-Lez (Hérault) ou encore à Angers (Maine-et-Loire).
Le broyage précède le tri par tamisage vibrant aidé par un air soufflant et qui alimente les différents sacs. Toute matière jugée insuffisamment propre est renvoyée au stade précédent. Mais Veolia n’a pas encore résolu tous les problèmes. La preuve avec le silicium. Il est extrait sous forme de poudre avec deux catégories de pureté, dont la mieux valorisée atteint 70%. "Le but est d’atteindre 100% de pureté, prévient le directeur du site du Rousset. Nous travaillons sur la technologie - qui sera traité par les hydro-métallurgistes - pour arriver à nos fins, mais nous sommes encore au stade de la R&D." Aucune date n’est encore annoncée pour purifier cette matière critique, mais l’horizon devrait être assez proche. La recherche n’est pas terminée. Pour décoller les différentes couches, Veolia s’intéresse à un procédé basé sur une source lumineuse. De là à dire que Veolia a trouvé la lumière…