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Le Pic Pétrolier ne sauvera pas le climat- bien au contraire

Publié : 16 avr. 2007, 16:13
par tom
Le Pic Pétrolier ne sauvera pas le climat - bien au contraire


Si vous pensez que le pic pétrolier apportera la solution au problème de l'effet de serre, en diminuant de fait les émissions de CO2, vous avez tort. Vraiment tort. David Strahan explique pourquoi.


Par David Strahan, BBC News, le 29 mars 2007

De nombreuses personnes pensent que la raréfaction du pétrole - le Pic Pétrolier - donera l'occasion de combattre efficacement le réchauffement. Ils ont tort.

Il est de plus en plus évident que la production pétrolière connaîtra bientot un déclin, aux conséquences économiques potentiellement dévastatrices.

Bien que le concept de pic pétrolier ait traditionnellement été considéré comme peu sérieux par l'industrie du pétrole, aujourd'hui, même les grands patrons du secteurs en acceptent l'idée.

L'année dernière Thierry Desmarest, le président de Total, quatrième compagnie au monde, a déclaré que le pic pourrait intervenir aux alentours de 2020, et enjoint les gouvernements à mettre en oeuvre des politiques de limitation de la demande afin de reculer le moment fatidique où s'amorcera le déclin de la ressource.

D'autres observateurs sont convaincus que le pic de production est plus proche encore. De nombreux écologistes se méfient de ces prévisions qu'ils interprètent comme des manoeuvres visant à faire croire que le problème du réchauffement se réglera de lui-même en l'absence de pétrole.

Stephen Tindale de Greepeace, lui, ne croit pas à l'imminence du pic, mais espère tout de même qu'il se produira rapidement.

« Espérons que le pétrole s'épuise, ansi le monde devra développer des énergies alternatives rapidement, et pour le problème du climat, le résultat sera excellent », m'a-t-il déclaré.

Rien n'est plus faux.

Croissance sale

Il est mathématiquement impossible que le pic pétrolier soit la solution au changement climatique. Bien que le pétrole soit la première source énergétique responsable de l'émission des gaz à effet de serre, le charbon et le gaz, pris ensemble, ont un rôle encore plus important, et la croissance probable des émissions qui leur sont dues sera supérieure à la diminution de celles causées par le pétrole.

Ainsi que je le démontre dans « Le Dernier Choc Pétrolier » [1], en utilisant les chiffres du scénario d'estimation moyenne [2] de L'Agence Internationale de l'Energie (AIE), même si la production pétrolière atteignait son sommet en 2010 et commençait immédiatement à décliner de 3% par an, le total des émissions des gaz à effets de serre continuerait à croître de 25% pour atteindre 32 milliards de tonnes en 2030.

Alors que nous devrions à cette époque avoir diminué nos émissions d'au moins 60%.

De fait, le pic pétrolier pourrait rendre les choses encore pires s'il nous pousse à exploiter les mauvaises sources d'énergies.

Brûler les forêts tropicales ou les tourbières pour les convertir en plantations destinées à la production d'huile végétale relacherait de grandes quantités de CO2 dans l'atmosphère, et a déjà conduit l'Indonésie - selon certaines méthodes de calcul - a être le troisième émetteur de CO2 au monde, après les USA et la Chine.

Le carburant synthétique obtenu à partir du gaz naturel selon la méthode Fischer-Tropsch produit plus de carbone - en mesurant l'empreinte totale du CO2, depuis le puits jusqu'à l'utilisation - que le carburant classique. El lorsque le carburant est produit à partir du charbon, ces émissions doublent.

Aucune de ces méthodes alternatives ne semblent à même de combler le déficit de production du pétrole, tout au moins pas assez rapidement.

Mais dans la mesure où elles sont bien plus émettrices de carbone, il n' est pas difficile d' imaginer un scénario dans lequel nous souffririons en même temps de pénurie de carburant tout en émettant encore plus de CO2 que ce prévoyait le modèle de l' AIE, ce qui serait le pire des mondes possibles.

La contrainte de l' espace

Bien que ces carburants s' avèreront vraisemblablement peu adaptés, nous pourrions y être contraints car les alternatives plus propres sont encore plus inadaptées pour toutes sortes de raisons.

Les biocarburants peuvent être produits durablement avec une réelle réduction des émissions de CO2, mais dans le monde industrialisé, nous ne disposons tout simplement pas des terres nécessaires.

Dans les pays en développement, toutefois, il reste de vastes étendues qui pourraient accueillir une production durable de canne à sucre, mais les travaux requis pour palier au manque de carburant classique seraient gigantesques.

J' ai calculé que pour combler le déficit en carburant après le pic pétrolier avec un déclin annuel de 3%, il faudrait planter chaque année 200 000 km carrés, soit à peu près la taille de Cuba, du Sri Lanka et de la Papouasie Nouvelle Guinée.

Alternativement, si nous décidions de convertir les transports routiers en Grande Bretagne en développant des moteurs fontionnant à l' hydrogène produit écologiquement, c' est à dire par électrolyse de l' eau qui ne génère pas de CO2, nos options pour y parvenir seraient :

67 centrales nucléaires de type Sizewell B [3]
Une centrale solaire couvrant chaque mètre carré du Norfolk et du Derbyshire réunis.
Une centrale éolienne plus grande que la région sud ouest de la Grande Bretagne.

L' envol des prix

Lorsque la production pétrolière commencera à baisser, l' impact économique pourrait être catastrophique.

L' envol du prix du pétrole pourrait entraîner une dépression mondiale plus grave que celle des années 30, et l' effondrement des bourses compromettrait notre capacité à financer les coûteuses infrastructures d'énergie propre dont nous aurions besoins.

Devant l'allongement des files de chômeurs, la volonté politique de combattre les changements climatiques pourrait être mise à mal par la nécessité de maintenir l'énergie au cout le plus bas possible.

De nombreux écologistes semblent se soucier peu du pic pétrolier, parcequ'ils n'arrivent pas à concevoir que cela puisse être aussi important que le changement climatique.

Mais c'est passer à coté du problème.

La raréfaction du pétrole est un problème extrêmement grave, non seulement en lui-même, mais aussi parce qu'il a pourrait être responsable à la fois d'un accroissement des émissions, et de la destrution de la prospérité qui serait nécessaire pour combattre le réchauffement climatique.

Et pour cette raison - parmi d'autres - il pourrait également détruire notre civilisation.

David Strahan est un journaliste d'investigation et réalisateur de documentaires.


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Publication originale BBC

En complément lire, Risks of the oil transition une publication de l'Environment Research Letter par A E Farrell and A R Brandt, de l'Energy and Resources Group, University of California, Berkeley



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[1] The Last Oil Shock , version anglaise sur Amazon

[2] Scénario de l'AIE nommé « Business as usual »

[3] Sizewell B est un réacteur à eau pressurisée produisant 1200 MégaWatts


Publié : 16 avr. 2007, 16:40
par GillesH38
Lorsque la production pétrolière commencera à baisser, l’impact économique pourrait être catastrophique.

L’envol du prix du pétrole pourrait entraîner une dépression mondiale plus grave que celle des années 30, et l’effondrement des bourses compromettrait notre capacité à financer les coûteuses infrastructures d’énergie propre dont nous aurions besoins.

Devant l’allongement des files de chômeurs, la volonté politique de combattre les changements climatiques pourrait être mise à mal par la nécessité de maintenir l’énergie au cout le plus bas possible.
Il y a une legere contradiction dans cette théorie : toutes les recessions ont diminué les émissions de CO2 ! (ce sont d'ailleurs les seuls évènements qui aient réussi cet exploit !). Quand les gens n'ont plus d'argent pour acheter de l'essence qui coûte 10$ le baril a produire, ils en ont encore moins pour en acheter à 50 $. Justement, en cas de récession, il n'y a plus du tout de pression sur la demande....

Publié : 16 avr. 2007, 17:17
par Tiennel
Toutes les recessions ont diminué les émissions de CO2 !
Sauf justement la dernière (2001-2003), qui a vu les émissions s'accélerer !

Et je pourrais même ajouter l'actuelle, puisqu'il me semble que tu penses que nous sommes déjà en récession, Gilles :-D

Publié : 16 avr. 2007, 23:00
par ten
Si l'on remplace le petrole par du charbon, c'est sur que ca n'arrangera pas le climat. Mais le Pic Oil fera peut etre prendre conscience au monde que nous sommes sur une fausse route et qu'il faut reorganiser notre société, qui sait? on peut rever.

Publié : 17 avr. 2007, 07:59
par GillesH38
Tiennel a écrit :
Toutes les recessions ont diminué les émissions de CO2 !
Sauf justement la dernière (2001-2003), qui a vu les émissions s'accélerer !

Et je pourrais même ajouter l'actuelle, puisqu'il me semble que tu penses que nous sommes déjà en récession, Gilles :-D
il n'y a pas eu vraiment de récession mondiale en 2000, juste aux States, et c'est surtout du a l'eclatement de la bulle internet. Et non, je ne dis pas qu'on est en récession actuellement, je dis qu'on tire la croissance actuelle par l'augmentation des inégalités, et que c'est une situation caractéristique d'une pré-crise.

Publié : 17 avr. 2007, 08:06
par Tiennel
il n'y a pas eu vraiment de récession mondiale en 2000, juste aux States
:shock:
L'Asie était déjà en récession depuis 1997 ! Et en Europe, il y a eu arrêt du recrutement dans la plupart des entreprises et multiplications des plans sociaux.

Re: Le Pic Pétrolier ne sauvera pas le climat - bien au cont

Publié : 20 sept. 2007, 00:26
par energy_isere
tom a écrit :
Le Pic Pétrolier ne sauvera pas le climat - bien au contraire
Je viens de tomber à nouveau sur cet article du mois de Mars, qui est donné sur contreinfo. http://contreinfo.info/article.php3?id_article=833

Ca me semble toujours d' actualité. Rien ne vient prouver le contraire depuis. Si le pétrole recule, le charbon va prendre la reléve et generer encore plus de CO2 par unité d' energie produite. :cry:

Publié : 20 sept. 2007, 00:51
par Tiennel
Oui, mais reste toujours ouverte la double question :
  1. des réserves de charbon restantes : permettront-elles de poursuivre, au rythme actuel, la production de carbone jusqu'en 2100 ?
  2. de la cadence d'extraction dudit charbon : même si les réserves sont là, pourra-t-on les consommer à la cadence actuelle ?
Nous manquons de charbonniers émérites, sur ce forum comme sur les autres anglophones, pour avancer significativement sur la question.

Publié : 20 sept. 2007, 07:43
par GillesH38
Il est possible que le développement du charbon compense le PO, au moins au début, mais dans ce cas ca veut dire qu'on n'aura pas d'énorme conséquence économique au PO : juste des difficultés parce que ce sera plus cher, mais pas l'effondrement economique prévu par les survivalistes. Les croissances énergétiques comme celles de la Chine se font en période de boom économique, pas pendant les récessions !!

maintenant comme dit Tiennel on a besoin d'estimations fiables des réserves économiquement accessibles en charbon, et d'un travail aussi sérieux sur la date et le montant du pic charbon , qui est mathématiquement tout aussi certain que le PO. Le moins qu'on puisse dire est que les chiffres paraissent assez fantaisistes et variables selon les sources... est-ce qu'on doit croire les chiffres officiels alors que ceux concernant le pétrole ont été aussi évidemment faux?

Publié : 20 sept. 2007, 08:24
par mobar
Tiennel a écrit :Oui, mais reste toujours ouverte la double question :
  1. des réserves de charbon restantes : permettront-elles de poursuivre, au rythme actuel, la production de carbone jusqu'en 2100 ?
  2. de la cadence d'extraction dudit charbon : même si les réserves sont là, pourra-t-on les consommer à la cadence actuelle ?
Nous manquons de charbonniers émérites, sur ce forum comme sur les autres anglophones, pour avancer significativement sur la question.
Voir sur terre de brut le pic charbonnier mondial prévu pour 2020.

http://www.terredebrut.org/article-11107720.html

Publié : 20 sept. 2007, 08:30
par Tiennel
Ok, Energy Watch Group est UNE source - qui a tout intérêt à annoncer un pic fossile proche pour faire décoller leur business (les EnR).

Comme le souligne Gilles, un peu plus d'avis de géologues indépendants serait nécessaire pour se forger des convictions.

Publié : 20 sept. 2007, 08:57
par mobar
Tiennel a écrit : Comme le souligne Gilles, un peu plus d'avis de géologues indépendants serait nécessaire pour se forger des convictions.
Est ce qu'il existe des géologues indépendants ayant une vue globale de la question?

Les questions énergétiques sont toujours tranchées par les politiques pour servir des stratégies de survie, de pouvoir de développement....

Tant qu'il n'y aura pas d'alternative plus efficace pour se fournir en énergie que le charbon, cellui-ci se développera (il en est de même avec le pétrole).

Si demain, le solaire, la biomasse ou un mix d'énergies primaires peut remplacer les fossiles et le nucléaire de façon efficace (et maitrisable par le pouvoir politique), il effacera d'un coup toutes nos spéculations sur les fossiles. ceux-ci resteront en place ou continueront à être exploitées par ceux qui ne maîtrisent pas l'alternative à n'importe quel prix.

Et lorsque le prix aura atteint un niveau suffisant pour rendre l'alternative viable clle ci sera utilisée. Et le charbon restant dormira dans son trou pour l'éternité, Amen.

Pas plus compliqué que ça!

Publié : 20 sept. 2007, 09:38
par hyperion
si le pouvoir ne maitrise pas l'alternative, il admet materiellement et psychologiquement le déclin, le charbon est tout de même bien une ressource de regression , un peu plus de transparence à ce niveau ne ferait pas de mal :lol:

les procedes CTL sont chers et probablment tres couteux en ressource, reproche svt attribué aux EnR.autant utiliser ce qui reste de débit en liquide voire le devancer et attribuer les investissemnts aux EnR, qlq que soit la date du pic charbon.

Publié : 20 sept. 2007, 09:47
par ticaribou
Tiennel a écrit :Oui, mais reste toujours ouverte la double question :
  1. des réserves de charbon restantes : permettront-elles de poursuivre, au rythme actuel, la production de carbone jusqu'en 2100 ?
  2. de la cadence d'extraction dudit charbon : même si les réserves sont là, pourra-t-on les consommer à la cadence actuelle ?
Nous manquons de charbonniers émérites, sur ce forum comme sur les autres anglophones, pour avancer significativement sur la question.
j'ai cru voir que nous avions pour environ 150 ans de charbon. Ici dans les mines du nord pas de calais les mines ont fermé car pas intéressantes financèrement par rapport au charbon. Rouvrir une mine c'est beaucoup d'investissement et d'énergie, et les veines les plus faciles ont été explorées. Nous pourrions sortir encore du charbon mais à quel prix humain !
D'autre part si tout le monde se tourne vers le charbon il n'y aura pas 150 ans de charbon.
Pour l'extraction j'ai vu qu'il existait des méthodes plus intéressantes, est-ce transposable dans toutes les veines, ça c'est aux spécialistes qu'il faut demander.

Publié : 20 sept. 2007, 09:48
par mobar
hyperion a écrit :si le pouvoir ne maitrise pas l'alternative, il admet materiellement et psychologiquement le déclin, le charbon est tout de même bien une ressource de regression , un peu plus de transparence à ce niveau ne ferait pas de mal :lol:

les procedes CTL sont chers et probablment tres couteux en ressource, reproche svt attribué aux EnR.autant utiliser ce qui reste de débit en liquide voire le devancer et attribuer les investissemnts aux EnR, qlq que soit la date du pic charbon.
Sauf que, si tu as des moyens de recherche, d'industrialisation, de financement supérieurs à tes petits copains tu n'as pas besoin de maitriser obligatoirement toutes les solutions au cours du temps. Tu as tout intérêt à minimiser les découvertes et à les garder sous le coude en continuant à participer à vider les stocks existants (pétrole, charbon, gaz naturel, uranium, biomasse ...).

Lorsque les stocks seront à un niveau suffisamment bas il ne te restera plus qu'a sortir la grosse artillerie et à industrialiser les nouvelles technologies pour écraser tous les adversaires potentiels d'hier devenus exangues.

Une stratégie de pouvoir comme une autre, ou de la complotite?