Série « Nature vs économie »
Épisode 3/3 :
Décarboner l'industrie lourde France Culture 1heure podcast :
https://www.radiofrance.fr/francecultur ... de-9061965
Jeudi 16 mars 2023
Quels sont les leviers technologiques, financiers et politiques mobilisables afin de réussir à décarboner les secteurs de l’acier, du ciment et de la chimie d'ici à 2050 ?
Avec
Claire Tutenuit Déléguée générale de l’Association française des Entreprises pour l’Environnement
Eric Bergé directeur de Peachtree (société de conseil en décarbonation) et chef de projet "Industrie" au Shift Project
L’industrie lourde est l’une des plus exposée par la transition écologique : fortement émettrice, sa conversion menace d’être trop coûteuse, en plus d’être technologiquement incertaine. La Stratégie nationale bas carbone (SNBC), qui définit les efforts à fournir dans chaque secteur, a fixé un objectif de 35% de gaz à effet de serre en moins d’ici 2030, et de 81% en 2050, par rapport à 2015.
L’industrie lourde, pilier de la stratégie de décarbonation française
L’industrie lourde a plusieurs caractéristiques qui la rendent très spécifique à l’échelle de l’économie française et de sa stratégie de décarbonation. Ses émissions, à l’inverse de la plupart des autres industries, ne peuvent pas être résolues par une simple électrification. Selon Eric Bergé "l'empreinte carbone de l'industrie en général est d'à peu près de 20% des émissions françaises, mais l'industrie lourde représente environ les 3/4 des émissions de l'industrie. Et si on prenait en compte tous les produits industriels qui sont importés par la France, le pourcentage serait nettement plus lourd car tout ce qui est produit en Chine ou en Allemagne aujourd'hui est au moins autant carboné, avec des voitures, des ordinateurs, l'acier, des fibres textiles importées qui sont issus par exemple de la pétrochimie". Dans le calcul de l'empreinte carbone il y a évidement la consommation d'énergie, mais il y a aussi des procédés chimiques qui rejettent du C02, et pour décarboner cette industrie on ne peut pas juste changer son mix énergétique, Claire Tutenuit explique "si on prend l'exemple du ciment, on utilise des cailloux et du granulat et on les fait cuire avec une réaction thermique, on chauffe, ce qui entraine une réaction chimique dégageant du carbone, du C02, et cela devient du ciment qu'on utilise ensuite. Il y a donc un problème chimique, à savoir est-ce qu'on arrive à modifier cette réaction pour qu'elle réabsorbe le C02 dans le process, cela fait partie des ruptures technologiques et des enjeux techniques sur lesquels l'industrie travaille. La première démarche qui a été faite, dans cette industrie très énergivore, c'est de changer les combustibles, et le cimenteries qui montent à de très hautes températures sont presque des incinérateurs. On peut donc utiliser des combustibles de récupération qui sont des déchets comprimés et on arrive à fabriquer du ciment avec cela, à peu près la moitié est de la biomasse. Par ailleurs, la deuxième grande avancée en cours c'est la réduction de la part du ciment utilisée pour fabriquer du béton".