Les SR Américains sur les intentions Russes en Ukraine fin 2021

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Les SR Américains sur les intentions Russes en Ukraine fin 2021

Message par phyvette » 17 août 2022, 02:36

Article du Washington post, c'est long mais goûtu, avec une introduction par un gars qui n'écrit pas avec ses pieds.
Un (très) long et passionnant article du Washington Post, très bien documenté, qui fait échos aux discussions que nous avions quant à l'origine des renseignements américains sur les intentions russes, et la réception que ces informations ont eu côté ukrainien. L'article est notamment issu de longues entrevues avec une douzaine de sources de hauts niveaux aux Etats-Unis, en Ukraine et dans plusieurs pays européens.

https://www.washingtonpost.com/national ... table-main

En résumé (dans le désordre, à mesure que je lisais l'article) :

- En octobre 2021, réunion dans le Bureau Ovale : les renseignements américains, via un mélange d'images satellites + interceptions + HUMINT, pensent que Poutine veut envahir l'Ukraine via une opération de grande envergure. Jake Sullivan lui-même, après avoir été sceptique, devient convaincu à mesure que les renseignements s'accumulent que c'est bien ce que compte faire la Russie.

- Les USA ont visiblement accès, de plusieurs manières, à des conversations/documents de très hauts niveaux, aussi côté civil que militaire.

- Biden est hésitant. Il ne veut pas embarquer les USA dans une nouvelle guerre, et sait que le pays jouis d'une crédibilité assez faible, surtout après les désastres Irakiens et surtout Afghans. Il ne veut rien entreprendre en dehors de l'OTAN, mais au niveau de l'alliance, les positions concernant la Russie sont alors extrêmement divergentes.

- Conjonctions de facteurs qui expliquent que les russes passent à l'attaque maintenant : Perception d'une fenêtre d'opportunité crée par le Coronavirus, la faiblesse de Biden, le manque de temps dont Poutine estime disposer avant sa propre fin, élections en France, transition politique en Allemagne, problèmes post-Brexit au R-U, ect. Parallèlement, plus les années passeront plus l'Ukraine sera occidentalisée et réarmée, rendant l'opération plus difficile.

- Forte croyance côté russe que la réaction occidentale sera peut-être très forte au niveau symbolique, mais finalement assez faible pour tout ce qui est concret.

- L'axe principal d'attaque, depuis la Biélorussie et constitué d'une double pince se refermant sur Kiev est identifiée très tôt.

- L'attaque était prévue en Hiver car l'E-M russe considérait que le sol gelé faciliterait la mobilité des chars.

- Tempo prévu pour prendre Kiev : 3 à 4 jours.

- Parallèlement à cet effort principal et aidée par l'effondrement politique du pays, avancée depuis le sud vers Odessa, et depuis l'Est vers le Dniepr. Délai prévu : plusieurs semaines

- A la fin de cette première phase, nouvel effort pour atteindre les frontières de la Moldavie et l'ouest de la Biélorussie. De l'Ukraine ne doit subsister qu'une petite poche autour de Lviv, que Poutine juge définitivement irrécupérable politiquement.

- A ce moment de l'histoire, la priorité US, dans l'ordre, est : 1) ne pas se retrouver dans une confrontation cinétique entre l'OTAN et la Russie 2) Contenir la guerre au sein des frontières géographiques de l'Ukraine 3) Ne pas faire exploser l'OTAN 4) Renforcer l'Ukraine autant que possible et lui donner les moyens de se battre

- Relative confiance des renseignements US avant la guerre concernant la volonté ukrainienne de se battre et sur sa capacité à résister au moins un temps si elle est correctement renseignée et aidée, mais sans espoir de victoire "Kiev ne tombera pas aussi vite que les russes ne l'espèrent, mais elle tombera".

- Grandes inquiétudes des Rens' US concernant Zelenski, qui est alors vu comme faible, peu compétent sur ces questions, et mal aimé par son opinion publique.

- Zelenski est informé des intentions russes par Blinken lors du sommet sur le Climat de Glasgow. Zelenski a écouté, mais précisé que les russes avaient déjà fait le coup de la fausse invasion de nombreuses fois.

- Selon les Ukrainiens, les USA n'ont commencé à fournir des preuves solides à l'Ukraine que quelques jours avant l'invasion, en dépit des demandes des SR ukrainiens

- Les ukrainiens n'ont pas forcément beaucoup apprécié la politique de "transparence" américaine sur le risque d'invasion. Les déclarations publiques américaines faisaient courir un vent de panique dans la société ukrainienne, impactaient directement l'économie ukrainienne (taux de changes, ect.) sans forcément beaucoup aider le pays à s'y préparer

- Les USA pour leur part disent qu'ils ont très vite fournis des preuves et des renseignements circonstanciés aux Ukrainiens pour étayer leur conviction d'une attaque imminente et de grande ampleur

- Mais en tout cas les USA n'ont pas tout fournis à l'Ukraine car ils craignaient que cela ne puisse servir aux ukrainiens à lancer une attaque préventive sur la Crimée, et ils considéraient en plus les services ukrainiens comme totalement infiltrés par le FSB, même à haut niveau.

- Biden fourni du renseignement sensible à la France, au R-U et à l'Allemagne en marge du G20 à Rome pour les convaincre de l'imminence de l'attaque. Les français et les allemands sont resté très sceptiques, contrairement aux britanniques et aux baltes (informés entre temps aussi). Il semble que l'épisode des ADM en Irak, et celui de l'effondrement soudain de l'Afghanistan n'y soient pas pour rien dans le scepticisme franco-allemand.

- Les français ne considèrent pas les SR américains comme une source fiable et sincère avec eux.

- Les allemands et les français considèrent que bien souvent les USA déforment volontairement les conclusions de leurs services pour les faire apparaître comme plus certaines qu'elles ne le sont vraiment, pour servir leurs intérêts politiques (c.f. Irak)

- Rapidement, trois camps dans l'OTAN :

Europe de l'Ouest/Sud : pas d'inquiétude, c'est le jeu habituel de Poutine

Europe Centrale : Possibilité que quelque chose se passe mais d'ampleur limitée

US + UK + Baltes : L'invasion sera massive et certaine

- A ce moment là, les SR ukrainiens sont aussi convaincus que les US que la guerre est inévitable, mais restent sceptique sur l'idée d'une frappe de décapitation sur Kiev. Pour eux, ça restera limité au Donbass. Zelenski est lui relativement sceptique, bien qu'inquiet également.

- Les USA ont proposé début Janvier au Russes une conversation de haut niveau avec la possibilité de discuter d'une limitation des systèmes américains en Europe et des déploiement de troupes dans les pays de l'Est, en échange d'une désescalade et du retrait des troupes russes de la frontière ukrainienne. Les Russes semblaient frustrés que les USA fassent des concessions, ce qui a encore renforcé la conviction US que c'était de la pure diplomatie performative destinée à justifier à posteriori l'invasion par l'intransigeance de l'OTAN.

- Dans les mois précédents l'invasion : passage de 74 000 à 100 000 soldats US en Europe, repositionnement de ces troupes (et des stocks) depuis l'Italie et la Grèce vers la Pologne et les pays Baltes, 12 escadrons de chasse au lieu de 4, et passage de 5 à 26 navires US autour de l'Europe.

- Mise en place parallèlement d'une ligne ultra sécurisée entre le US Europan Command et l'E-M Ukrainien.

- A partir de Décembre, accélération de la livraison d'équipements légers vers l'Ukraine, JAVELIN, MANPADs.

- Les ukrainiens sont informé des détails de l'assaut prévu sur Hostomel dès le 12 janvier

- Les US urgent Zelenski de préparer son opinion publique à l'inévitable. Zelenski les prends totalement à contrepied : si je dis au gens de stocker de la nourriture et de se préparer à la guerre, la moitié du pays fuira avant même que les russes arrivent, et ils prendront le pays en 3 jours. L'essentiel, c'est de garder les gens au pays, là où ils peuvent se battre.

- La position de Zelenski ne faisait pas l'unanimité au sein de son entourage et des SR ukrainiens qui pressaient le Président de prendre des mesures préventives sérieuses. Il semble d'ailleurs que ça a été fait localement sans ordre d'en haut : stockage de carburant et de munition, ect.

- Blinken a dit à Zelenski en Janvier qu'il devait envisager d'avoir à quitter Kiev si les russes s'approchaient de la ville, Zelenski a répondu que c'était hors de question.

- Zelenski s'est même mis à penser que ces appels du pied des américains pouvaient être une manière déguisée de l'écarter rapidement après le début de la guerre afin que l'Ouest puisse négocier avec le pantin russe qui sera installé à sa place.

- Macron persuadé que son coup de fil à Poutine le 20 février était "une percée", le lendemain, Poutine reconnaissait la DPR et la LPR.

- Les européens (français, allemands) ont surestimé leur compréhension de Poutine et de son fonctionnement.
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Image Quand on a un javelin dans la main, tous les problèmes ressemblent à un T-72.

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Re: Les SR Américains sur les intentions Russes en Ukraine fin 2021

Message par phyvette » 17 août 2022, 02:39

L'article payant du Washington post :
Le chemin de la guerre : Les États-Unis ont eu du mal à convaincre leurs alliés, et Zelensky, du risque d'invasion.

Avec Shane Harris, Karen DeYoung, Isabelle Khurshudyan, Ashley Parker et Liz Sly

Le 16 août à 7 h 39.

Par une matinée ensoleillée d'octobre, les principaux responsables du renseignement, de l'armée et de la diplomatie du pays se sont rendus dans le bureau ovale pour une réunion urgente avec le président Biden. Ils sont arrivés munis d'une analyse de renseignements hautement confidentielle, compilée à partir d'images satellites récemment obtenues, de communications interceptées et de sources humaines, qui correspondait aux plans de guerre du président russe Vladimir Poutine pour une invasion à grande échelle de l'Ukraine.

Pendant des mois, les responsables de l'administration Biden ont observé avec circonspection Poutine masser des dizaines de milliers de soldats et aligner des chars et des missiles le long des frontières de l'Ukraine. À la fin de l'été, Jake Sullivan, le conseiller à la sécurité nationale, s'était concentré sur le volume croissant de renseignements relatifs à la Russie et à l'Ukraine. Il avait organisé la réunion dans le Bureau ovale après que sa propre réflexion soit passée de l'incertitude quant aux intentions de la Russie à la crainte d'être trop sceptique quant aux perspectives d'une action militaire, puis à l'inquiétude.

La session était l'une des nombreuses réunions que les responsables ont tenues au sujet de l'Ukraine cet automne - se réunissant parfois en groupes plus restreints - mais elle s'est distinguée par le tableau détaillé des renseignements présentés. Biden et le vice-président Harris ont pris place dans des fauteuils devant la cheminée, tandis que le secrétaire d'État Antony Blinken, le secrétaire à la défense Lloyd Austin et le général Mark A. Milley, président des chefs d'état-major interarmées, ont rejoint les directeurs du renseignement national et de la CIA sur des canapés autour de la table basse.

Chargés par M. Sullivan de dresser un tableau complet des intentions de la Russie, ils ont déclaré à M. Biden que les renseignements sur les plans opérationnels de M. Poutine, ajoutés aux déploiements en cours le long de la frontière avec l'Ukraine, montraient que toutes les pièces étaient désormais en place pour un assaut massif.

Selon des responsables américains, la communauté du renseignement des États-Unis avait pénétré en de multiples points de la direction politique, de l'appareil d'espionnage et de l'armée de la Russie, des niveaux supérieurs aux lignes de front.

Bien plus radicaux que l'annexion de la Crimée par Moscou en 2014 et l'instigation d'un mouvement séparatiste dans l'est de l'Ukraine, les plans de guerre de Poutine envisageaient une prise de contrôle de la majeure partie du pays.

À l'aide de cartes montées sur des chevalets devant le Resolute Desk, Milley a montré les positions des troupes russes et le terrain ukrainien qu'elles avaient l'intention de conquérir. Il s'agit d'un plan d'une audace stupéfiante, qui pourrait constituer une menace directe pour le flanc oriental de l'OTAN, voire détruire l'architecture de sécurité de l'Europe après la Seconde Guerre mondiale.

Alors qu'il absorbait le briefing, Biden, qui avait pris ses fonctions en promettant de maintenir le pays à l'écart de nouvelles guerres, était déterminé à dissuader ou à affronter Poutine, et à ce que les États-Unis n'agissent pas seuls. Pourtant, l'OTAN est loin d'être unie sur la manière de traiter avec Moscou, et la crédibilité des États-Unis est faible. Après une occupation désastreuse de l'Irak, le chaos qui a suivi le retrait américain de l'Afghanistan, et quatre années où le président Donald Trump a cherché à saper l'alliance, il était loin d'être certain que Biden puisse diriger efficacement une réponse occidentale à une Russie expansionniste.

L'Ukraine était une ancienne république soviétique troublée, avec des antécédents de corruption, et la réponse des États-Unis et de leurs alliés aux précédentes agressions russes avait été incertaine et divisée. Lorsque l'invasion survient, les Ukrainiens ont besoin d'un nouvel armement important pour se défendre. Une quantité trop faible pourrait garantir une victoire russe. Mais une quantité trop importante pourrait provoquer un conflit direct entre l'OTAN et une Russie dotée de l'arme nucléaire.

Ce récit, qui contient des détails inédits, jette une lumière nouvelle sur l'âpreté du combat pour restaurer la crédibilité des États-Unis, sur la tentative de trouver un équilibre entre le secret entourant les renseignements et la nécessité de persuader les autres de leur véracité, et sur la difficulté de déterminer comment l'alliance militaire la plus puissante du monde pourrait aider une démocratie imparfaite à la frontière de la Russie à résister à une attaque sans que l'OTAN ne tire un coup de feu.

Premier d'une série d'articles sur le chemin de la guerre et la campagne militaire en Ukraine, il est tiré d'entretiens approfondis avec plus de trois douzaines de hauts responsables américains, ukrainiens, européens et de l'OTAN au sujet d'une crise mondiale dont la fin n'est pas encore déterminée. Certains ont parlé sous le couvert de l'anonymat afin de discuter de renseignements sensibles et de délibérations internes.

Le Kremlin n'a pas répondu aux demandes répétées de commentaires.

Alors que Milley exposait l'éventail des forces en ce matin d'octobre, lui et les autres ont résumé les intentions de Poutine. "Nous estimons qu'ils prévoient de mener une attaque stratégique importante contre l'Ukraine à partir de plusieurs directions simultanément", a déclaré Milley au président. "Leur version de 'choc et effroi'. ' "

D'après les renseignements, les Russes viendraient du nord, de part et d'autre de Kiev. Une force se déplacerait à l'est de la capitale en passant par la ville ukrainienne de Tchernihiv, tandis que l'autre flanquerait Kiev à l'ouest, en poussant vers le sud depuis le Bélarus par une brèche naturelle entre la "zone d'exclusion" de la centrale nucléaire abandonnée de Tchernobyl et les marais environnants. L'attaque aurait lieu en hiver, afin que la terre dure rende le terrain facilement praticable pour les chars. Formant une tenaille autour de la capitale, les troupes russes prévoient de s'emparer de Kiev en trois ou quatre jours. Les Spetsnaz, leurs forces spéciales, trouveront et destitueront le président Volodymyr Zelensky, en le tuant si nécessaire, et installeront un gouvernement fantoche favorable au Kremlin.

Séparément, les forces russes viendraient de l'est et traverseraient le centre de l'Ukraine jusqu'au fleuve Dniepr, tandis que les troupes de Crimée prendraient le contrôle de la côte sud-est. Ces actions pourraient prendre plusieurs semaines, selon les plans russes.

Après avoir fait une pause pour se regrouper et se réarmer, ils ont ensuite poussé vers l'ouest, vers une ligne nord-sud s'étendant de la Moldavie à l'ouest du Belarus, laissant un État ukrainien croupion à l'ouest - une région qui, dans le calcul de Poutine, était peuplée d'irrémédiables néonazis russophobes.

Les États-Unis avaient obtenu des "détails extraordinaires" sur les plans secrets du Kremlin pour une guerre dont il continuait à nier l'intention, a expliqué plus tard la directrice du renseignement national Avril Haines. Il s'agissait non seulement du positionnement des troupes, de l'armement et de la stratégie opérationnelle, mais aussi de détails tels que "l'augmentation inhabituelle et brutale du financement des opérations militaires d'urgence et de la constitution de forces de réserve par Poutine, alors même que d'autres besoins urgents, comme la réponse à une pandémie, manquaient de ressources", a-t-elle déclaré. Il ne s'agissait pas d'un simple exercice d'intimidation, contrairement à un déploiement russe à grande échelle en avril, lorsque les forces de Poutine avaient menacé les frontières de l'Ukraine sans jamais attaquer.

Certains membres de la Maison Blanche ont eu du mal à se faire une idée de l'ampleur des ambitions du dirigeant russe.

"Cela ne semblait pas être le genre de chose qu'un pays rationnel entreprendrait", a déclaré plus tard un participant à la réunion au sujet de l'occupation prévue de la majeure partie d'un pays de 232 000 miles carrés et de près de 45 millions d'habitants. Certaines parties de l'Ukraine sont profondément anti-russes, ce qui fait planer le spectre d'une insurrection même si Poutine renverse le gouvernement de Kiev. Et pourtant, les renseignements montrent que de plus en plus de troupes arrivent et s'installent pour une campagne complète. Des munitions, de la nourriture et des fournitures essentielles étaient déposées dans les campements russes.

Biden a pressé ses conseillers. Pensaient-ils vraiment que cette fois-ci, Poutine était susceptible de frapper ?

Oui, ils l'ont affirmé. C'est bien réel. Bien que l'administration ait publiquement insisté au cours des mois suivants sur le fait qu'elle ne croyait pas que Poutine avait pris une décision finale, la seule chose que son équipe ne pouvait pas dire au président ce jour d'automne était le moment exact où le président russe appuierait sur la gâchette.

Le directeur de la CIA, William J. Burns, qui avait été ambassadeur des États-Unis à Moscou et qui, de tous les membres du gouvernement Biden, avait eu les contacts les plus directs avec M. Poutine, a décrit aux autres le dirigeant russe comme étant obsédé par l'Ukraine. Le contrôle du pays était synonyme de la conception que Poutine se faisait de l'identité et de l'autorité russes. La précision de la planification de la guerre, associée à la conviction de Poutine que l'Ukraine doit être réabsorbée par la mère patrie, ne lui laisse aucun doute sur le fait que Poutine est prêt à envahir le pays.

"J'ai cru qu'il était très sérieux", a déclaré Burns des mois plus tard, en se souvenant du briefing.



II

Les renseignements avaient souligné la promesse des propres mots de Poutine. Trois mois plus tôt, en juillet, il avait publié un essai de 7 000 mots, intitulé "Sur l'unité historique entre les Russes et les Ukrainiens", rempli de griefs et d'affirmations douteuses. Selon lui, les Russes et les Ukrainiens forment "un seul peuple" - une idée qui trouve son origine dans les affirmations de Poutine sur les "liens du sang" - et Moscou a été "spolié" de son propre territoire par un Occident intrigant.

"Je suis convaincu que la véritable souveraineté de l'Ukraine n'est possible qu'en partenariat avec la Russie", a écrit M. Poutine.

Quelques semaines avant la parution de cet essai, M. Biden et M. Poutine avaient tenu, le 16 juin, un sommet qu'ils avaient tous deux déclaré "constructif". À ce moment-là, l'Ukraine était une préoccupation, mais les responsables de la Maison-Blanche estimaient qu'elle pouvait être traitée. Lorsque la délégation de la Maison-Blanche a quitté la réunion, qui s'est tenue à Genève, un collaborateur de haut rang de M. Biden se souviendra plus tard que "nous ne sommes pas montés dans l'avion pour rentrer chez nous en pensant que le monde était à l'aube d'une guerre majeure en Europe."

Mais la publication ultérieure de Poutine "a attiré notre attention de façon importante", a déclaré plus tard M. Sullivan. "Nous avons commencé à nous demander ce qui se passait ici, quel était son objectif final ? Jusqu'où va-t-il aller ?" Par précaution, le 27 août, Biden a autorisé que 60 millions de dollars d'armes largement défensives soient puisés dans les stocks américains et envoyés en Ukraine.

À la fin de l'été, alors qu'ils reconstituaient les renseignements en provenance de la frontière et de Moscou, les analystes qui avaient passé leur carrière à étudier Poutine étaient de plus en plus convaincus que le dirigeant russe - lui-même ancien officier de renseignement - voyait une fenêtre d'opportunité se refermer. Les Ukrainiens s'étaient déjà soulevés à deux reprises pour réclamer un avenir démocratique, libéré de la corruption et de l'ingérence de Moscou, lors de la révolution orange de 2004-2005 et des manifestations de Maidan de 2013-2014 qui ont précédé l'annexion de la Crimée par la Russie.

Bien qu'elle ne soit pas membre de l'OTAN ou de l'Union européenne, l'Ukraine se déplace désormais régulièrement dans l'orbite politique, économique et culturelle de l'Occident. Cette dérive alimente le ressentiment plus général de Poutine concernant la perte de l'empire russe.

Dans une sombre évaluation actuarielle, les analystes ont conclu que M. Poutine, qui allait avoir 69 ans, avait compris qu'il lui restait peu de temps pour cimenter son héritage en tant que l'un des grands dirigeants russes, celui qui avait restauré la prééminence de la Russie sur le continent eurasien.

Selon les analystes, M. Poutine a calculé que toute réponse occidentale à une tentative de reconquête de l'Ukraine par la force serait marquée par l'indignation mais limitée en termes de sanctions réelles. Le dirigeant russe, ont-ils dit, pensait que l'administration Biden était châtiée par le retrait humiliant des États-Unis d'Afghanistan et voulait éviter de nouvelles guerres. Les États-Unis et l'Europe sont toujours aux prises avec la pandémie de coronavirus. La chancelière allemande Angela Merkel, leader européen de facto, quitte son poste et transmet le pouvoir à un successeur qui n'a pas fait ses preuves. Le président français Emmanuel Macron était confronté à une bataille de réélection contre une droite résurgente, et la Grande-Bretagne souffrait d'un ralentissement économique post-Brexit. De grandes parties du continent dépendaient du pétrole et du gaz naturel russes, que Poutine pensait pouvoir utiliser comme un coin pour diviser l'alliance occidentale. Il avait accumulé des centaines de milliards de dollars de réserves de liquidités et était convaincu que l'économie russe pourrait résister aux inévitables sanctions, comme elle l'avait fait dans le passé.

Lorsqu'on lui a présenté les nouveaux renseignements et les nouvelles analyses lors du briefing d'octobre, M. Biden a eu " essentiellement deux réactions ", a déclaré M. Sullivan. Tout d'abord, pour tenter de dissuader Poutine, ils "devaient envoyer quelqu'un à Moscou pour s'asseoir avec les Russes à un niveau élevé et leur dire : 'Si vous faites ça, voici les conséquences. ' "

Deuxièmement, ils devaient informer les alliés des renseignements fournis par les États-Unis et les rallier à ce que l'administration considérait comme une position unifiée et sévère de menaces de sanctions contre la Russie, de renforcement et d'expansion des défenses de l'OTAN et d'aide à l'Ukraine.

Burns a été envoyé à Moscou et Haines au siège de l'OTAN à Bruxelles.

Des mois plus tard, Milley avait toujours dans sa mallette des fiches résumant les intérêts et les objectifs stratégiques des États-Unis discutés lors du briefing d'octobre. Il pouvait les réciter du bout des doigts.

Problème : "Comment garantir et faire respecter l'ordre international fondé sur des règles" contre un pays doté d'une capacité nucléaire extraordinaire, "sans aller jusqu'à la troisième guerre mondiale ?"

N° 1 : "Ne pas avoir de conflit cinétique entre l'armée américaine et l'OTAN avec la Russie." No. 2 : "Contenir la guerre à l'intérieur des frontières géographiques de l'Ukraine." No. 3 : "Renforcer et maintenir l'unité de l'OTAN." No. 4 : "Donner à l'Ukraine les moyens de se battre."

Les conseillers de M. Biden étaient convaincus que l'Ukraine se battrait. Les États-Unis, la Grande-Bretagne et d'autres membres de l'OTAN avaient passé des années à former et à équiper l'armée ukrainienne, qui était plus professionnelle et mieux organisée qu'avant l'assaut de la Russie contre la Crimée et la région orientale de Donbas, sept ans plus tôt. Mais la formation a porté presque autant sur la manière d'organiser la résistance interne après une occupation russe que sur la manière de l'empêcher en premier lieu. Les armes fournies étaient principalement de petit calibre et défensives, afin de ne pas être perçues comme une provocation occidentale.

L'administration était également très préoccupée par le jeune président ukrainien, un ancien comique de la télévision qui était entré en fonction grâce à une énorme vague de soutien populaire et au désir d'un changement fondamental, mais qui avait perdu la cote auprès du public en partie parce qu'il n'avait pas réussi à tenir sa promesse de faire la paix avec la Russie. Zelensky, 44 ans, ne semblait pas être à la hauteur de l'impitoyable Poutine.

Les mathématiques ne jouaient pas en faveur de l'Ukraine. La Russie disposait de plus de troupes, de plus de chars, de plus d'artillerie, de plus d'avions de chasse et de missiles guidés, et avait démontré lors de conflits précédents sa volonté de soumettre ses adversaires les plus faibles, sans se soucier des pertes civiles.

Les Américains ont conclu que Kiev ne tomberait peut-être pas aussi rapidement que les Russes l'avaient prévu, mais qu'elle tomberait.

III

Le 2 novembre, Burns a été escorté dans le bureau du Kremlin de Yuri Ushakov, conseiller en politique étrangère de Poutine et ancien ambassadeur aux États-Unis. Le patron d'Ushakov était à l'autre bout d'une ligne téléphonique et parlait à Burns depuis la station balnéaire de Sochi, où il s'était retiré pendant une autre vague d'infections au coronavirus à Moscou.

Le dirigeant russe a récité ses plaintes habituelles concernant l'expansion de l'OTAN, la menace pour la sécurité russe et le leadership illégitime en Ukraine.

"Il ne voyait pas du tout le président Zelensky comme un leader politique", se souvient Burns.

Habitué à écouter les tirades de Poutine depuis ses années à Moscou, Burns a délivré son propre message énergique : Les États-Unis savent ce que vous préparez, et si vous envahissez l'Ukraine, vous en paierez le prix fort. Il a dit qu'il laissait une lettre de Biden, affirmant les conséquences punitives de toute attaque russe contre l'Ukraine.

Poutine "était très concret", a déclaré M. Burns. Il n'a pas nié les renseignements qui pointaient vers une invasion russe de l'Ukraine.

Le directeur de la CIA a également rencontré un autre conseiller de Poutine, Nikolai Patrushev, un ancien officier du KGB, originaire de Saint-Pétersbourg, la ville natale de Poutine, qui dirigeait le Conseil de sécurité de la Russie.

M. Patrushev pensait que M. Burns s'était rendu à Moscou pour discuter de la prochaine rencontre entre M. Poutine et M. Biden et semblait surpris que le chef de la CIA soit venu avec un avertissement concernant l'Ukraine.

Dans ses discussions avec Burns, il a repris presque exactement les griefs de Poutine concernant l'histoire et l'OTAN. Il ne semblait pas y avoir de place pour un engagement significatif, et le directeur de la CIA s'est demandé si Poutine et son cercle restreint d'assistants avaient formé leur propre chambre d'écho. Poutine n'avait pas pris la décision irréversible d'entrer en guerre, mais son point de vue sur l'Ukraine s'était durci, son appétit pour le risque avait augmenté et le dirigeant russe pensait que le moment opportun allait bientôt passer.

"Mon niveau d'inquiétude a augmenté, il n'a pas diminué", a rapporté le chef des espions à Biden.

IV

Alors que Burns s'entretenait avec Poutine, Blinken s'asseyait avec Zelensky, à Glasgow, en Écosse, en marge d'un sommet international sur le changement climatique. Il a dressé le tableau des renseignements et décrit la tempête russe qui se dirigeait vers l'Ukraine.

"Il n'y avait que nous deux, à deux pieds l'un de l'autre", se souvient Blinken. C'était une "conversation difficile".

M. Blinken avait déjà rencontré le président ukrainien et pensait le connaître suffisamment pour parler franchement, même s'il lui semblait surréaliste de "dire à quelqu'un que vous croyez que son pays va être envahi".

Il a trouvé Zelensky "sérieux, délibéré, stoïque", un mélange de conviction et d'incrédulité. Il a dit qu'il allait informer ses équipes principales. Mais les Ukrainiens avaient "vu un certain nombre de feintes russes dans le passé", savait Blinken, et Zelensky était clairement inquiet d'un effondrement économique si son pays paniquait.

La présentation de Blinken, et le scepticisme de Zelensky, ont établi un modèle qui allait se répéter en privé et en public au cours des mois suivants. Les Ukrainiens ne pouvaient pas se permettre de rejeter en bloc les renseignements américains. Mais de leur point de vue, l'information était spéculative.

M. Zelensky a entendu les avertissements américains, comme il l'a rappelé plus tard, mais il a déclaré que les Américains ne proposaient pas le type d'armes dont l'Ukraine avait besoin pour se défendre.

"Vous pouvez dire un million de fois, 'Ecoutez, il pourrait y avoir une invasion'. Ok, il peut y avoir une invasion - vous nous donnerez des avions ?" a dit Zelensky. "Allez-vous nous donner des défenses aériennes ? Eh bien, vous n'êtes pas membre de l'OTAN... Oh, ok, alors de quoi parlons-nous ?"

Les Américains ont fourni peu de renseignements spécifiques pour étayer leurs avertissements "jusqu'aux quatre ou cinq derniers jours avant le début de l'invasion", selon Dmytro Kuleba, le ministre des affaires étrangères de Zelensky.

Moins de deux semaines après la réunion de Glasgow, lorsque Kuleba et Andriy Yermak, le chef de cabinet de Zelensky, se sont rendus au Département d'État à Washington, un haut fonctionnaire américain les a accueillis avec une tasse de café et un sourire. "Les gars, creusez les tranchées !" a commencé le fonctionnaire.

"Quand nous avons souri en rentrant", se souvient Kuleba, le fonctionnaire a dit : "Je suis sérieux. Commencez à creuser des tranchées. ... Vous allez être attaqués. Une attaque à grande échelle, et vous devez vous y préparer". Nous avons demandé des détails ; il n'y en avait pas."

Si les Américains ont été frustrés par le scepticisme de l'Ukraine à l'égard des plans de la Russie, les Ukrainiens n'ont pas été moins déconcertés par les avertissements de plus en plus publics des États-Unis quant à l'imminence d'une invasion.

"Nous avons dû trouver un équilibre entre une évaluation réaliste des risques et la préparation du pays au pire... et le maintien du fonctionnement économique et financier du pays", a déclaré Kuleba. "Chaque commentaire venant des États-Unis sur le caractère inévitable de la guerre était immédiatement répercuté sur le taux de change de la monnaie [ukrainienne]."

Un certain nombre de responsables américains ont contesté les souvenirs des Ukrainiens, affirmant qu'ils ont fourni au gouvernement de Kiev des renseignements spécifiques dès le début et tout au long de la période précédant l'invasion.

Pourtant, lorsqu'il s'agissait de l'Ukraine, les services de renseignement américains n'étaient pas vraiment des livres ouverts. Les directives officielles interdisaient aux agences d'espionnage de partager des informations tactiques que l'Ukraine pourrait utiliser pour lancer des attaques contre les troupes russes en Crimée ou contre les séparatistes soutenus par le Kremlin dans l'est du pays.

L'appareil de renseignement ukrainien était lui aussi truffé de taupes russes, et les responsables américains craignaient que des informations sensibles ne tombent entre les mains de Moscou. Après le début de la guerre, l'administration Biden a changé de politique et a partagé des informations sur les mouvements de troupes russes dans toute l'Ukraine, au motif que le pays se défendait désormais contre une invasion.

DANS

Lors d'une réunion parallèle à la conférence du Groupe des 20 à Rome fin octobre, M. Biden a partagé certaines des nouvelles informations et conclusions avec les plus proches alliés des États-Unis, à savoir les dirigeants de la Grande-Bretagne, de la France et de l'Allemagne.

À la mi-novembre, M. Haines a profité d'un voyage prévu à Bruxelles pour informer un cercle plus large d'alliés : le Conseil de l'Atlantique Nord de l'OTAN, le principal organe de décision de l'alliance des 30 membres. S'exprimant dans un grand auditorium, elle a limité ses remarques à ce que la communauté du renseignement estimait être des preuves et n'a pas formulé de recommandations politiques.

"Un certain nombre de membres ont soulevé des questions et se sont montrés sceptiques à l'idée que le président Poutine se prépare sérieusement à l'éventualité d'une invasion à grande échelle", se souvient M. Haines.

Les responsables français et allemands ne comprennent pas pourquoi Poutine tenterait d'envahir et d'occuper un grand pays avec seulement les 80 000 à 90 000 soldats qui seraient massés à la frontière. Des images satellites ont également montré que les troupes allaient et venaient de la frontière. D'autres ont avancé que les Russes effectuaient un exercice, comme le Kremlin lui-même l'a affirmé, ou qu'ils jouaient un tour de passe-passe destiné à dissimuler un objectif autre qu'une invasion.

La plupart étaient dubitatifs, et ont noté que Zelensky semblait penser que la Russie n'attaquerait jamais avec l'ambition et la force que les Américains prévoyaient. L'Ukraine n'est-elle pas celle qui comprend le mieux les intentions de la Russie ?

Seuls les Britanniques et les États baltes sont entièrement d'accord. À un moment donné, un fonctionnaire de Londres s'est levé et a fait un geste en direction de Haines. "Elle a raison", a dit le fonctionnaire.

Mais Paris et Berlin se sont souvenus des affirmations catégoriques des États-Unis concernant les renseignements sur l'Irak. L'ombre de cette analyse profondément défectueuse planait sur toutes les discussions précédant l'invasion. Certains estimaient également que Washington, quelques mois plus tôt, avait largement surestimé la résilience du gouvernement afghan au moment où l'armée américaine se retirait. Le gouvernement s'était effondré dès l'entrée des talibans à Kaboul.

"Le renseignement américain n'est pas considéré comme une source naturellement fiable", a déclaré François Heisbourg, expert en sécurité et conseiller de longue date des responsables français. "Il était considéré comme enclin à la manipulation politique".

Les Européens commencent à s'installer dans des camps qui ne changeront guère pendant plusieurs mois.

"Je pense qu'il y a eu fondamentalement trois variantes", a déclaré un haut fonctionnaire de l'administration. Pour beaucoup d'Européens de l'Ouest, ce que les Russes faisaient était "de la diplomatie coercitive, [Poutine] était juste en train de construire pour voir ce qu'il pouvait obtenir. Il ne va pas nous envahir... c'est de la folie".

De nombreux nouveaux membres de l'OTAN en Europe de l'Est et du Sud-Est pensaient que Poutine "pourrait faire quelque chose, mais que ce serait de portée limitée", a déclaré le fonctionnaire, "... une autre morsure à la pomme [ukrainienne]", similaire à ce qui s'est passé en 2014.

Mais la Grande-Bretagne et les États baltes, qui sont toujours nerveux quant aux intentions de la Russie, croient qu'une invasion à grande échelle se prépare.

Lorsque des États membres sceptiques ont demandé davantage de renseignements, les Américains en ont fourni quelques-uns, mais se sont abstenus de les partager tous.

Historiquement, les États-Unis ont rarement révélé leurs renseignements les plus sensibles à une organisation aussi diversifiée que l'OTAN, principalement par crainte d'une fuite de secrets. Si les Américains et leurs partenaires britanniques ont effectivement partagé une quantité importante d'informations, ils n'ont pas divulgué les interceptions brutes ou la nature des sources humaines qui étaient essentielles pour déterminer les plans de Poutine. Cela a particulièrement frustré les responsables français et allemands, qui soupçonnaient depuis longtemps que Washington et Londres cachaient parfois la base de leurs renseignements pour les faire paraître plus définitifs qu'ils ne l'étaient réellement.

Certains des pays de l'alliance ont fourni leurs propres conclusions, a précisé M. Haines. Les États-Unis ont également créé de nouveaux mécanismes pour partager des informations en temps réel avec leurs partenaires étrangers à Bruxelles. Austin, Blinken et Milley étaient au téléphone avec leurs homologues, partageant, écoutant, cajolant.

Au fil du temps, s'est souvenu un haut fonctionnaire européen de l'OTAN, "les renseignements ont été présentés de manière répétée, cohérente, claire, crédible et très détaillée, avec un très bon scénario et des preuves à l'appui. Je ne me souviens pas d'un moment clé où l'ampoule s'est allumée" dans les efforts déployés pendant des mois pour convaincre les alliés, a déclaré le responsable. En fin de compte, "c'était le volume des lumières dans la pièce".

NOUS

Macron et Merkel ont traité avec Poutine pendant des années et ont eu du mal à croire qu'il était irrationnel au point de lancer une guerre calamiteuse. Dans les semaines qui ont suivi la réunion de Genève de M. Biden, ils ont tenté d'organiser un sommet UE-Russie, qui a été rejeté par les membres sceptiques du bloc qui y voyaient une dangereuse concession à la position agressive de la Russie.

Des mois plus tard, malgré les nouveaux renseignements américains, les Français et les Allemands insistent sur le fait qu'il y a une chance pour la diplomatie. Les Américains et les Britanniques ont peu d'espoir que tout effort diplomatique porte ses fruits, mais sont prêts à laisser la porte ouverte - si les Européens donnent quelque chose en retour.

"Une grande partie de nos efforts, se souvient Sullivan, consistait essentiellement à leur dire : "Écoutez, nous allons suivre la voie diplomatique et la considérer comme sérieuse... si vous prenez au sérieux la planification du dispositif de forces [militaires] et des sanctions". ' "

Chaque partie était convaincue d'avoir raison mais était prête à faire comme si elle pouvait avoir tort.

Au cours des mois suivants, les Américains se sont efforcés de montrer aux Européens de l'Ouest et à d'autres qu'ils étaient toujours disposés à rechercher une solution pacifique, même si, au fond d'eux-mêmes, ils étaient convaincus que tout effort de négociation de la part de la Russie était une mascarade. "Cela a fondamentalement fonctionné", a déclaré M. Sullivan à propos de la stratégie de l'administration.

Le 7 décembre, Poutine et Biden se sont entretenus lors d'un appel vidéo. M. Poutine a affirmé que l'expansion vers l'est de l'alliance occidentale était un facteur important dans sa décision d'envoyer des troupes à la frontière de l'Ukraine. Selon lui, la Russie ne faisait que protéger ses propres intérêts et son intégrité territoriale.

M. Biden a répondu qu'il était peu probable que l'Ukraine rejoigne l'OTAN dans un avenir proche et que les États-Unis et la Russie pouvaient parvenir à des accords sur d'autres préoccupations de la Russie concernant le placement de systèmes d'armes américains en Europe. En théorie, il y avait matière à compromis.

Pendant un certain temps, alors que M. Blinken dirigeait l'effort diplomatique américain par des visites répétées dans les capitales de l'OTAN et au siège de l'alliance à Bruxelles, les Ukrainiens ont poursuivi leurs contacts avec les gouvernements européens qui semblaient encore beaucoup moins convaincus des intentions de Poutine que les Américains.

Kuleba et d'autres membres du gouvernement croyaient qu'il y aurait une guerre, a déclaré plus tard le ministre ukrainien des Affaires étrangères. Mais jusqu'à la veille de l'invasion, "je ne pouvais pas croire que nous serions confrontés à une guerre d'une telle ampleur. Le seul pays au monde qui nous disait avec autant de certitude qu'il y aurait des frappes de missiles était les États-Unis d'Amérique. (...) Tous les autres pays ne partageaient pas cette analyse et [au contraire] disaient, oui, la guerre est possible, mais ce sera plutôt un conflit localisé dans l'est de l'Ukraine."

"Mettez-vous à notre place", a déclaré Kuleba. "Vous avez, d'un côté, les États-Unis qui vous disent quelque chose de complètement inimaginable, et tout le monde qui cligne des yeux en vous disant que ce n'est pas ce que nous pensons qui va se passer."

En fait, les Britanniques et certains responsables baltes pensaient qu'une invasion complète était probable. Mais Kuleba était loin d'être le seul à être sceptique. Son président le partageait, selon les assistants de Zelensky et d'autres fonctionnaires qui l'ont informé.

"Nous avons pris au sérieux toutes les informations que nos partenaires occidentaux nous donnaient", se souvient Yermak, le chef de cabinet de Zelensky. "Mais soyons honnêtes : imaginez si toute cette panique que tant de gens poussent avait eu lieu. Créer la panique est une méthode des Russes. ... Imaginez si cette panique avait commencé trois ou quatre mois auparavant. Que serait-il arrivé à l'économie ? Aurions-nous été capables de tenir pendant cinq mois comme nous l'avons fait ?"

VII

Début janvier, la secrétaire d'État adjointe Wendy Sherman a conduit une délégation diplomatique à Genève et a rencontré son homologue russe, Sergei Ryabkov, qu'elle connaissait bien. Celui-ci a réitéré la position de Moscou sur l'Ukraine, formellement proposée à la mi-décembre dans deux propositions de traités - à savoir que l'OTAN doit mettre fin à ses plans d'expansion et cesser toute activité dans les pays qui ont rejoint l'alliance après 1997, ce qui inclut la Pologne, la Roumanie, la Bulgarie et les États baltes.

Rejetant la proposition de fermer les portes de l'OTAN et de réduire le statut des membres existants, l'administration a proposé des pourparlers et des mesures de confiance dans un certain nombre de domaines de sécurité, notamment le déploiement de troupes et le placement d'armes sur le flanc est de l'OTAN, le long de la frontière avec la Russie. Cette offre était conditionnée à la désescalade de la menace militaire contre l'Ukraine. M. Ryabkov a déclaré à M. Sherman que la Russie était déçue par l'attitude américaine.

La Maison Blanche avait envisagé la réunion de Sherman avec Ryabkov comme "une chance de tester si les Russes étaient sérieux quant à la substance des préoccupations ... et s'il y avait une voie à suivre pour toute forme de diplomatie", a déclaré Emily Horne, alors porte-parole du Conseil de sécurité nationale. "Je pense qu'il est devenu assez clair, assez rapidement, que [les Russes] faisaient de la diplomatie, sans vraiment en entreprendre. Ils ne le faisaient même pas avec beaucoup de sérieux."

"Tous les alliés occidentaux voulaient faire comprendre qu'il y avait une voie alternative impliquant le dialogue et le respect de la Russie en tant que grande puissance", a déclaré un haut fonctionnaire du gouvernement britannique impliqué dans les négociations. "Ce qui est devenu de plus en plus clair, c'est que la Russie n'était pas intéressée par ces éléments".

Tout en poursuivant la voie diplomatique, les États-Unis ont également positionné des forces pour défendre l'OTAN, toutes visibles pour Moscou et les Européens et démontrant la volonté des Américains de s'impliquer dans le jeu. Alors que M. Biden n'a cessé de répéter qu'il n'y aurait pas de troupes américaines en Ukraine, le Pentagone a augmenté les stocks d'armes prépositionnées en Pologne et y a transféré un bataillon d'hélicoptères depuis la Grèce. Des parachutistes du 171e Airborne ont été déployés dans les États baltes. Des troupes supplémentaires ont été envoyées d'Italie vers l'est de la Roumanie, et d'autres sont allées en Hongrie et en Bulgarie.
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phyvette
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Re: Les SR Américains sur les intentions Russes en Ukraine fin 2021

Message par phyvette » 17 août 2022, 02:40

La suite de l'article du Post.
Au cours des mois suivants, la présence militaire américaine en Europe est passée de 74 000 à 100 000 hommes. Quatre escadrons de chasseurs aéroportés sont devenus 12, et le nombre de navires de combat de surface dans la région est passé de cinq à 26. Des patrouilles aériennes de combat et de surveillance effectuent des missions 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 sur le flanc oriental de l'alliance, avec une visibilité jusqu'en Ukraine.

Nous disions : "Écoutez, nous prenons la diplomatie au sérieux, mais nous sommes tellement inquiets que nous déplaçons des hommes et du matériel", se souvient M. Sullivan.

Avec l'autorisation de la National Security Agency, les États-Unis ont établi une ligne de communication directe entre l'armée ukrainienne et le Commandement européen des États-Unis. Ce système hautement sécurisé permettrait aux Américains de rester en contact direct avec leurs homologues ukrainiens au fur et à mesure de l'évolution des événements.

L'administration envoyait également des armes à l'Ukraine. En décembre, M. Biden a autorisé l'envoi de 200 millions de dollars d'armes supplémentaires provenant des stocks américains, alors même que le gouvernement de Kiev, de nombreux membres du Congrès et certains membres de l'administration elle-même affirmaient que si les États-Unis pensaient réellement qu'une invasion à grande échelle se préparait, ce n'était pas suffisant.

Mais chaque étape de la campagne de l'administration était fondée sur la volonté d'éviter une implication directe des États-Unis dans un affrontement militaire. La préoccupation dominante de la Maison Blanche concernant la provocation a influencé chaque décision concernant le niveau d'assistance et le type d'armes à fournir aux Ukrainiens pour qu'ils puissent se défendre.

"Je ne m'excuse pas du fait que l'un de nos objectifs ici est d'éviter un conflit direct avec la Russie", a déclaré M. Sullivan à propos de la période d'avant-guerre.

Les Russes allaient faire ce qu'ils ont fait indépendamment de ce que les alliés ont fait, a déclaré un haut fonctionnaire impliqué dans les décisions, et l'administration a trouvé "incroyable" l'idée, comme certains l'ont affirmé plus tard avec le recul, que "si seulement nous avions donné" plus d'armes aux Ukrainiens, "rien de tout cela ne serait arrivé".

Déterminer si la Russie interpréterait un exercice militaire ou une livraison d'armes comme une provocation ou une escalade relève "plus de l'art que de la science", a déclaré le fonctionnaire. "Il n'y a pas de formule mathématique claire et facile. (...) Il y a toujours eu un équilibre entre ce qui est nécessaire pour se défendre efficacement et ce qui va être perçu par la Russie comme les États-Unis garantissant essentiellement le meurtre d'un grand nombre de Russes."

Les responsables ukrainiens ont exprimé une gratitude sans fin aux États-Unis pour ce qu'ils ont fourni depuis le début de la guerre. "Aucun autre pays au monde n'a fait plus pour que l'Ukraine obtienne les armes nécessaires que les États-Unis depuis le 24 février. Aucun autre pays au monde", a récemment déclaré M. Kuleba. Mais dès le début, a-t-il ajouté, lui et d'autres responsables ukrainiens ont estimé que la stratégie de "non-provocation" était la mauvaise.

"Où nous a-t-il emmenés ?" a déclaré Kuleba. "Je pense que cette guerre - avec des milliers de morts et de blessés, des territoires perdus, une partie de l'économie détruite... est la meilleure réponse à ceux qui prônent encore la non-provocation de la Russie."

VII

Dans le cadre de sa campagne permanente visant à convaincre le monde de ce qui se prépare - et à dissuader les Russes - la Maison Blanche a décidé, vers la fin de l'année 2021, de remettre en question sa propre réticence, ainsi que celle des agences de renseignement, à rendre publiques certaines de leurs informations les plus sensibles.

Les services de renseignement américains avaient repéré des opérations "sous faux drapeau" planifiées par les Russes, dans lesquelles ils mettaient en scène des attaques contre leurs propres forces comme si elles venaient d'Ukraine. Exposer publiquement ces plans pourrait priver Poutine de la possibilité de concocter un prétexte pour une invasion, ont estimé les responsables de l'administration.

Dans un premier temps, la Maison Blanche a décidé de révéler l'ampleur du renforcement des troupes qui se poursuit aux frontières de l'Ukraine. Début décembre, l'administration a publié des photos satellites, ainsi qu'une carte créée par des analystes américains montrant les positions des troupes russes et une analyse de la communauté du renseignement sur la planification russe.

Selon l'analyse, les Russes prévoyaient des "mouvements importants" de 100 groupes tactiques de bataillons, impliquant jusqu'à 175 000 soldats, ainsi que des blindés, de l'artillerie et des équipements. L'image que les responsables de l'administration avaient élaborée pendant des semaines en secret était maintenant visible dans le monde entier.

En prévision de divulgations plus sélectives de renseignements, M. Sullivan a mis en place un processus régulier à la Maison Blanche dans lequel une équipe détermine si une information particulière, si elle est rendue publique, pourrait contrecarrer les plans ou la propagande russes. Dans l'affirmative, l'information serait alors soumise à la communauté du renseignement, qui formulerait des recommandations sur l'opportunité et la manière de la diffuser.

Fin janvier, le gouvernement britannique a publiquement accusé la Russie de comploter pour installer un régime fantoche à Kiev. Cette allégation, fondée sur les renseignements américains et britanniques, a été révélée dans une déclaration de presse très inhabituelle du ministre des affaires étrangères, Liz Truss, tard dans la soirée à Londres mais juste à temps pour les journaux du dimanche matin.

Et début février, l'administration Biden a révélé que Moscou envisageait de filmer une fausse attaque ukrainienne contre le territoire russe ou des personnes parlant russe - le faux drapeau que les services de renseignement avaient détecté. Selon les responsables, le film de propagande ferait la part belle au spectacle, avec des scènes graphiques d'explosions, accompagnées de cadavres présentés comme des victimes et de personnes en deuil faisant semblant de pleurer les morts.

"J'avais vu Poutine établir faussement le récit trop souvent", a déclaré un autre responsable américain. Maintenant, "vous pouviez le voir planifier de manière assez spécifique dans les faux drapeaux [de l'est de l'Ukraine]. C'était assez précis".

Les divulgations des services de renseignement avaient elles-mêmes un aspect théâtral. La révélation initiale d'images satellites pouvait être corroborée par des images commerciales, même si l'analyse était propre à la communauté du renseignement. Mais le fait que le public croie ou non les révélations ultérieures dépendait de la crédibilité du gouvernement. Et les responsables de l'administration Biden savaient qu'ils devaient faire face à un public, dans leur pays et à l'étranger, qui pouvait être profondément sceptique à l'égard du "renseignement", à la suite de la guerre en Irak et de la prise de pouvoir par les talibans en Afghanistan.

D'une manière générale, la campagne d'information publique des États-Unis a fonctionné. L'attention mondiale s'est concentrée sur le renforcement des troupes russes. L'idée que Poutine falsifierait les raisons de son invasion semblait plausible, peut-être parce qu'en 2014, il avait nié totalement la présence de ses troupes en Crimée, une affirmation qui a conduit à des descriptions de "petits hommes verts" en uniformes militaires sans insigne occupant une partie de l'Ukraine.

Étant donné le scepticisme de certains alliés à l'égard des renseignements, l'effet le plus important de leur divulgation a été de façonner le comportement de la Russie et de priver Poutine du pouvoir d'utiliser la désinformation, ont déclaré les responsables américains.

IX



Le 12 janvier, Burns a rencontré Zelensky à Kiev et lui a livré une évaluation franche. Les services de renseignements ont compris que la Russie avait l'intention de frapper Kiev et de décapiter le gouvernement central. Les États-Unis ont également découvert un élément clé de la planification du champ de bataille : La Russie essaierait d'abord de faire atterrir ses forces à l'aéroport d'Hostomel, dans la banlieue de la capitale, où les pistes pourraient accueillir d'énormes transports russes transportant des troupes et des armes. L'assaut sur Kiev commencerait là.

À un moment de leur conversation, Zelensky a demandé si lui ou sa famille étaient personnellement en danger. Burns a répondu que Zelensky devait prendre sa sécurité personnelle au sérieux.

Les risques pour le président étaient croissants. Les services de renseignement de l'époque indiquaient que des équipes d'assassins russes pouvaient déjà se trouver à Kiev, attendant d'être activées.

Mais Zelensky résiste aux appels à la délocalisation de son gouvernement et est inflexible sur le fait qu'il ne doit pas paniquer le public. Il pensait qu'en suivant cette voie, il s'exposait à la défaite.

"Vous ne pouvez pas simplement me dire : "Écoutez, vous devriez commencer à préparer les gens maintenant et leur dire qu'ils doivent mettre de l'argent de côté, qu'ils doivent stocker de la nourriture"", se souvient Zelensky. "Si nous avions communiqué cela - et c'est ce que voulaient certaines personnes, que je ne nommerai pas - alors j'aurais perdu 7 milliards de dollars par mois depuis octobre dernier, et au moment où les Russes ont attaqué, ils nous auraient pris en trois jours. ... En général, notre sens intérieur avait raison : si nous semons le chaos parmi les gens avant l'invasion, les Russes nous dévoreront. Parce que pendant le chaos, les gens fuient le pays."

Pour Zelensky, la décision de garder les gens dans le pays, où ils pouvaient se battre pour défendre leurs maisons, était la clé pour repousser toute invasion.

"Aussi cynique que cela puisse paraître, ce sont les personnes qui ont tout arrêté", a-t-il déclaré.

Les responsables ukrainiens sont restés irrités par le fait que les Américains n'en disent pas plus sur leurs sources de renseignement. "Les informations que nous recevions étaient, je dirais, un exposé des faits sans que soient révélées les origines de ces faits ou le contexte dans lequel ils s'inscrivent", se souvient M. Kuleba.

Mais les services de renseignement occidentaux n'étaient pas les seuls à penser que Zelensky devait se préparer à une invasion à grande échelle. Certains responsables du renseignement ukrainien, tout en restant sceptiques quant à l'éventualité d'une attaque de Poutine, se préparaient au pire. Kyrylo Budanov, le chef du renseignement militaire ukrainien, a déclaré avoir déménagé les archives de son quartier général trois mois avant la guerre et avoir préparé des réserves de carburant et de munitions.

Les avertissements américains ont été réitérés le 19 janvier lorsque Blinken s'est rendu brièvement à Kiev pour une réunion en tête-à-tête avec Zelensky et Kuleba. À la consternation du secrétaire d'État, Zelensky a continué à affirmer que tout appel public à la mobilisation provoquerait la panique, ainsi qu'une fuite des capitaux qui pousserait l'économie ukrainienne, déjà chancelante, dans le précipice.

Bien que Blinken ait souligné, comme il l'avait fait lors de conversations précédentes, l'importance de préserver la sécurité et l'intégrité de Zelensky et de son gouvernement, il était l'un des nombreux hauts fonctionnaires américains qui ont réfuté les informations selon lesquelles l'administration les avait exhortés à évacuer la capitale. "Ce que nous avons dit à l'Ukraine était deux choses", a rappelé plus tard M. Blinken. "Nous vous soutiendrons quoi que vous vouliez faire. Nous vous recommandons d'examiner ... comment vous pouvez assurer la continuité des opérations gouvernementales en fonction de ce qui se passe." Cela pourrait signifier se retrancher à Kiev, se relocaliser dans l'ouest de l'Ukraine ou transférer le gouvernement dans la Pologne voisine.

Zelensky a dit à Blinken qu'il restait.

Il avait commencé à soupçonner certains responsables occidentaux de vouloir le faire fuir pour que la Russie puisse installer un gouvernement fantoche qui parviendrait à un accord négocié avec les puissances de l'OTAN. "Les partenaires occidentaux voulaient - je suis sûr que quelqu'un était vraiment inquiet de ce qui allait arriver à moi et à ma famille", a déclaré Zelensky. "Mais quelqu'un voulait probablement en finir plus rapidement. Je pense que la majorité des personnes qui m'ont appelé - enfin, presque tout le monde - n'avaient pas la foi que l'Ukraine peut résister à cela et persévérer."

De même, avertir les Ukrainiens de se préparer à la guerre comme certains partenaires le souhaitaient, a-t-il dit, aurait affaibli le pays sur le plan économique et facilité la capture par les Russes. "Que les gens discutent à l'avenir pour savoir si c'était bien ou mal", a rappelé le dirigeant ukrainien, "mais je sais définitivement et intuitivement - nous en discutions tous les jours au Conseil de sécurité nationale et de défense, etc... - j'avais le sentiment que [les Russes] voulaient nous préparer à une reddition en douceur du pays. Et ça, c'est effrayant".

X

Lors d'une conférence de presse le 19 janvier, Biden a déclaré qu'il pensait que la Russie allait envahir le pays. Poutine était allé trop loin pour se retirer. " Il doit faire quelque chose ", a déclaré le président.

M. Biden a promis que l'Occident répondrait à l'attaque de la Russie. "Nos alliés et partenaires sont prêts à imposer des coûts sévères et des dommages importants à la Russie et à l'économie russe", a-t-il déclaré, prédisant que si Poutine ordonnait une invasion, cela s'avérerait un "désastre" pour la Russie.

C'était l'un des avertissements les plus fermes de Biden à ce stade. Mais le président a également brouillé les pistes, suggérant qu'une "incursion mineure" des forces russes, par opposition à une invasion à grande échelle, pourrait ne pas entraîner la réponse sévère dont lui et ses alliés avaient menacé.

"C'est une chose s'il s'agit d'une incursion mineure, et nous finissons par devoir nous battre sur ce qu'il faut faire et ne pas faire, etc. ", a déclaré M. Biden, signalant que l'OTAN n'était pas unie dans son opposition à tout recours à la force par la Russie. "Si les forces russes franchissent la frontière, tuent des combattants ukrainiens, etc., je pense que cela change tout ", a déclaré M. Biden lorsque, plus tard au cours de la conférence de presse, un journaliste lui a demandé de préciser ce qu'il entendait par " incursion mineure ".

"Mais cela dépend de ce qu'il [Poutine] fait, en fait, dans quelle mesure nous allons pouvoir obtenir une unité totale sur le front de l'OTAN".

Les commentaires de Biden ont révélé les fissures dans la planification de sa propre administration, ainsi que dans l'OTAN. M. Blinken était à Kiev, où il a promis que les États-Unis soutiendraient l'Ukraine, de toutes les manières possibles, sauf en engageant leurs propres forces, si le pays était attaqué. Mais en privé, les responsables de l'administration réfléchissaient depuis des semaines à la manière dont ils répondraient à une attaque "hybride", dans laquelle la Russie pourrait lancer des cyberattaques préjudiciables à l'Ukraine et un assaut limité sur la partie orientale du pays.

M. Zelensky et ses assistants, qui n'étaient toujours pas convaincus que Poutine irait en guerre, ont répondu aux commentaires de M. Biden concernant une "incursion mineure" par un tweet caustique.

"Nous voulons rappeler aux grandes puissances qu'il n'y a pas d'incursions mineures et de petites nations. Tout comme il n'y a pas de pertes mineures et de petits chagrins dus à la perte d'êtres chers. Je dis cela en tant que président d'une grande puissance."

Le lendemain, Biden a précisé que si "des unités russes assemblées franchissent la frontière ukrainienne, il s'agit d'une invasion" pour laquelle Poutine paiera. Mais les responsables de la Maison Blanche ont discrètement regretté que, alors que l'administration tentait de rallier le soutien de l'Ukraine, Zelensky était plus intéressé par le fait de piquer le président dans les yeux à propos d'une

"C'était frustrant", a déclaré un ancien fonctionnaire de la Maison Blanche. "Nous prenions des mesures qui tentaient de l'aider, et on avait l'impression qu'il protégeait sa propre marque politique en étant dans le déni ou en projetant de la confiance parce que c'est ce qui était important pour lui à ce moment-là."

Un collaborateur de Zelensky qui a participé à l'élaboration du tweet a déclaré qu'il était destiné à réfuter Biden, mais aussi à être léger et humoristique, une façon de désamorcer la tension naissante. Les proches de Zelensky craignaient que les prédictions de Washington selon lesquelles la guerre était imminente n'aient des conséquences inattendues.

Alors que Biden clarifiait la situation, l'équipe de Zelensky a tenté d'apaiser Washington avec un message conciliant.

"Merci @POTUS pour l'assistance diplomatique et militaire sans précédent [des États-Unis] pour [l'Ukraine]", a tweeté Zelensky, avec des emoji des drapeaux américain et ukrainien.

XI

Le 21 janvier était une journée froide et morne à Genève, avec des rafales de vent fouettant la surface du lac habituellement placide qui partage le nom de la ville suisse. Alors que M. Blinken et ses collaborateurs étaient assis en face de leurs homologues russes à une table dressée dans la salle de bal d'un hôtel de luxe situé sur la rive, le secrétaire d'État a proposé les moutons blancs comme métaphore. Peut-être, a dit M. Blinken au ministre russe des affaires étrangères Sergei Lavrov, pourraient-ils calmer les eaux turbulentes entre leurs deux pays.

Ils ont échangé des amabilités tendues et ont abordé d'autres sujets - une prise de bec sur la taille et les activités de leurs ambassades respectives dans la capitale de l'autre, l'accord sur le nucléaire iranien - avant d'aborder l'Ukraine. M. Blinken a de nouveau exposé la position des États-Unis. Si Poutine avait des préoccupations légitimes en matière de sécurité, les États-Unis et leurs alliés étaient prêts à en parler. Mais si une invasion de l'Ukraine commençait, les sanctions occidentales seraient rapides et impitoyables, isolant la Russie et paralysant son économie, et l'alliance fournirait à l'Ukraine une aide militaire massive. Si un soldat ou un missile russe touchait un pouce du territoire de l'OTAN, les États-Unis défendraient leurs alliés.

Blinken a trouvé les réponses de Lavrov stridentes et inflexibles. Après une heure et demie de va-et-vient infructueux, il semble qu'il n'y ait plus grand-chose à dire. Mais alors que leurs assistants commençaient à sortir de la salle de bal, Blinken s'est retenu et a demandé au ministre russe de lui parler seul à seul. Les deux hommes sont entrés dans une petite salle de conférence adjacente et ont fermé la porte alors que les équipes américaine et russe se tenaient ensemble, mal à l'aise, à l'extérieur.

Au cours des presque 18 années passées par M. Lavrov en tant que ministre des affaires étrangères de la Russie, une succession de diplomates américains l'ont trouvé brusque et doctrinaire, mais parfois franc et réaliste sur les relations entre leurs deux pays. Après avoir passé en revue la situation en Ukraine, M. Blinken s'est arrêté et a demandé : "Sergei, dites-moi ce que vous essayez vraiment de faire ?". S'agit-il vraiment des préoccupations sécuritaires que la Russie a soulevées à maintes reprises, à savoir l'"empiètement" de l'OTAN sur la Russie et la perception d'une menace militaire ? Ou s'agit-il de la conviction quasi théologique de Poutine que l'Ukraine fait et a toujours fait partie intégrante de la Mère Russie ?

Sans répondre, M. Lavrov a ouvert la porte et s'est éloigné, suivi de son personnel.

C'était la dernière fois que les hauts responsables de la sécurité nationale de la Russie et des États-Unis se rencontraient en personne avant l'invasion.

M. Biden s'est entretenu une nouvelle fois avec M. Poutine par téléphone. Le 12 février, selon la Maison-Blanche, il a dit au président russe que "si les États-Unis restent prêts à s'engager dans la diplomatie, en pleine coordination avec nos alliés et partenaires, nous sommes également prêts pour d'autres scénarios."

XII



Un jour plus tôt, le ministre britannique de la Défense, Ben Wallace, s'était rendu à Moscou pour rencontrer son homologue russe, Sergei Shoigu, un survivant de longue date du Kremlin qui a contribué à sculpter l'image de dur à cuire de Poutine.

M. Wallace a voulu demander une fois de plus s'il était possible de négocier sur les exigences de M. Poutine concernant l'expansion de l'OTAN et les activités de l'alliance en Europe de l'Est. Les Russes, a-t-il dit, n'ont montré aucun intérêt à s'engager.

Wallace a averti Shoigu que la Russie ferait face à une résistance féroce si elle envahissait l'Ukraine. "Je connais les Ukrainiens - je me suis rendu cinq fois en Ukraine - et ils se battront".

"Ma mère est ukrainienne", a répondu M. Wallace, laissant entendre que M. Shoigu connaissait mieux le peuple. "Tout cela fait partie de notre même pays".

Wallace a ensuite évoqué la perspective de sanctions. Shoigu a répondu : "Nous pouvons souffrir comme personne d'autre. Et j'ai répondu : 'Je ne veux pas que quelqu'un souffre. ' "

M. Shoigu a présenté une longue liste de plaintes, désormais bien connue, et a déclaré que la Russie ne pouvait tolérer la trajectoire occidentale de l'Ukraine. "C'était à certains égards incompréhensible", a déclaré un fonctionnaire britannique qui a assisté à la réunion. "Tout le monde voulait poursuivre les négociations - nous lancions des rampes de sortie, mais ils ne les prenaient pas."

Alors que les officiels britanniques étaient sur le point de partir, Shoigu s'est adressé directement à Wallace. Il m'a regardé dans les yeux et m'a dit : "Nous n'avons pas l'intention d'envahir l'Ukraine", se souvient Wallace. "Cela vous montre à quel point c'était un mensonge".

Une semaine plus tard, le 18 février, M. Biden a appelé les dirigeants de plusieurs alliés de l'OTAN pour leur faire part de la dernière analyse américaine. Plus tard ce jour-là, Biden a déclaré aux journalistes dans la salle Roosevelt de la Maison-Blanche : " À ce moment précis, je suis convaincu qu'il a pris la décision " d'envahir. "Nous avons des raisons de le croire."

Les Français, cependant, continuent à chercher une issue à la crise.

Le 20 février, Macron a appelé Poutine et lui a demandé d'accepter une réunion à Genève avec Biden. Cette conversation a amené le président français à penser que Poutine était enfin disposé à chercher un règlement.

"C'est une proposition qui mérite d'être prise en compte", a dit Poutine, selon un enregistrement de la conversation diffusé des mois plus tard dans un documentaire de France TV, "Un président, l'Europe et la guerre".

Macron a pressé le dirigeant russe. "Mais peut-on dire, aujourd'hui, à l'issue de cette conversation, que nous sommes d'accord sur le principe ? Je voudrais une réponse claire de votre part sur ce point. Je comprends votre résistance à fixer une date. Mais êtes-vous prêt à aller de l'avant et à dire, aujourd'hui, 'je voudrais une réunion [en face à face] avec les Américains, puis élargie aux Européens' ? Ou pas ?"

Poutine ne s'est pas engagé et a semblé avoir des affaires plus pressantes en main. "Pour être parfaitement franc avec vous, je voulais aller [jouer] au hockey sur glace, parce qu'en ce moment je suis à la salle de sport. Mais avant de commencer ma séance d'entraînement, je vous assure que je vais d'abord appeler mes conseillers."

"Je vous remercie, Monsieur le Président", a conclu Poutine en le remerciant en français.

On entend Macron rire de plaisir en raccrochant. Le président français et ses conseillers pensent avoir fait une percée. Le conseiller diplomatique de Macron, Emmanuel Bonne, a même dansé.

Mais le lendemain, lors d'une allocution télévisée, Poutine a officiellement reconnu deux provinces ukrainiennes séparatistes du Donbas, dont un territoire contrôlé par Kiev, comme des États indépendants. C'était un signe évident que Poutine - mis à part ses plaisanteries en français - avait l'intention de démembrer l'Ukraine.



XIII





Alors que la Grande-Bretagne et la France font de ultimes efforts diplomatiques, les dirigeants mondiaux se réunissent à Munich pour une conférence annuelle sur la sécurité. Zelensky était présent, ce qui a suscité l'inquiétude de certains responsables américains qui craignaient que son absence ne donne à la Russie le moment idéal pour frapper. D'autres se sont demandé si le dirigeant ukrainien pensait que la Russie allait attaquer et s'il en avait profité pour quitter le pays avant que les bombes ne commencent à tomber.

Dans un discours, Zelensky a rappelé que son pays était déjà en guerre contre la Russie, les troupes ukrainiennes combattant les séparatistes de l'Est depuis 2014.

"Pour aider réellement l'Ukraine, il n'est pas nécessaire de ne parler constamment que des dates d'une invasion probable", a déclaré Zelensky. Au contraire, l'Union européenne et l'OTAN devraient accueillir l'Ukraine au sein de leurs organisations.

Certains responsables européens n'étaient toujours pas convaincus de l'imminence d'une attaque. L'un d'eux a déclaré à un journaliste : "Nous n'avons pas nous-mêmes de preuves claires que Poutine a pris sa décision, et nous n'avons rien vu qui puisse suggérer le contraire."

"On se sentait dans un autre monde", a déclaré le fonctionnaire britannique. Dans les conversations à bâtons rompus, les responsables américains et britanniques étaient convaincus de l'imminence d'une invasion, mais "ce n'était pas l'ambiance dans la salle".

Certains à Londres ont commencé à douter d'eux-mêmes, a déclaré le responsable britannique. "Les gens disaient que [nous] nous étions trompés sur l'Afghanistan. Nous sommes revenus et avons à nouveau effacé les renseignements [sur l'Ukraine]."

Ils sont arrivés à la même conclusion : la Russie allait envahir le pays. Mais malgré la campagne diplomatique et de partage des renseignements menée par les États-Unis, le projet est resté difficile à vendre.

"Si vous découvrez les plans de quelqu'un pour attaquer un pays et que ces plans semblent complètement farfelus, il y a de fortes chances que vous réagissiez rationnellement et que vous considériez que c'est tellement farfelu que cela ne va pas se produire", a déclaré M. Heisbourg, l'expert français en sécurité.

"Les Européens ont surestimé leur compréhension de Poutine", a-t-il déclaré. "Les Américains, je suppose... plutôt que d'essayer de se mettre dans la tête de Poutine, ont décidé qu'ils allaient agir sur la base des données et ne pas s'inquiéter de savoir si cela a un sens ou non."

Il y avait de nombreuses raisons d'être mystifié. Les services de renseignement américains ont montré que les plans de guerre du Kremlin ne parvenaient pas jusqu'aux commandants du champ de bataille qui devaient les exécuter. Les officiers ne connaissaient pas leurs ordres. Les troupes se présentaient à la frontière sans comprendre qu'elles se dirigeaient vers la guerre. Certains analystes du gouvernement américain ont été déconcertés par le manque de communication au sein de l'armée russe. Les choses étaient tellement tordues, pensaient les analystes, que les plans de la Russie pouvaient en fait échouer. Mais cela reste un point de vue nettement minoritaire.

Pour Kuleba, le tournant s'est produit dans les jours qui ont suivi la conférence de Munich du 18 au 20 février, lorsqu'il s'est à nouveau rendu à Washington. "C'est à cette époque que j'ai reçu des informations plus précises", se souvient-il. À un aéroport spécifique A en Russie, lui ont-ils dit, cinq avions de transport étaient déjà en état d'alerte, prêts à prendre des parachutistes à tout moment et à les faire voler en direction d'un aéroport spécifique B en Ukraine.

"C'est là que vous voyez la séquence des événements et la logique de ce qui se passe", a-t-il dit.

Les responsables des services de renseignement occidentaux reconnaissent, au vu de ce qui s'est avéré être une attaque russe désordonnée contre Kiev, qu'ils ont surestimé l'efficacité de l'armée russe.

"Nous avons supposé qu'ils envahiraient un pays de la même manière que nous l'aurions fait", a déclaré un fonctionnaire britannique.

XIV





Tôt dans la soirée du 23 février, la Maison Blanche reçoit un flash de renseignement urgent. Il y avait une "forte probabilité" que l'invasion ait commencé. Les troupes sont en mouvement et les Russes ont tiré des missiles sur des cibles en Ukraine. Les principaux conseillers du président se sont rassemblés ; certains se sont réunis dans la salle de crise, tandis que d'autres les ont rejoints sur une ligne sécurisée.

Sullivan a parlé avec Yermak, le chef de cabinet de Zelensky. Il y avait "un niveau d'agitation extrêmement élevé" à Kiev, a déclaré une personne familière de l'appel. "Ils ne sont pas devenus incontrôlables. Ils étaient juste extrêmement émotifs, mais de la manière à laquelle on pouvait s'attendre."

Yermak dit à Sullivan de patienter - il voulait faire venir Zelensky au téléphone pour parler directement à Biden. Sullivan connecta l'appel à la Treaty Room, une partie de la résidence de la Maison Blanche au deuxième étage utilisée comme bureau, et obtint le président au bout du fil.

Zelensky a imploré Biden de contacter immédiatement le plus grand nombre possible d'autres dirigeants et diplomates mondiaux. Il devrait leur dire de s'exprimer publiquement et d'appeler directement Poutine pour lui dire "d'arrêter ça".

"Zelensky était alarmé", se souvient la personne. Il a demandé à Biden de " 'nous fournir tous les renseignements que vous pouvez maintenant. Nous allons nous battre, nous allons nous défendre, nous pouvons tenir, mais nous avons besoin de votre aide. ' "

M. Harris était à Washington et à Londres, M. DeYoung à Washington, à Bruxelles et aux bases conjointes de Ramstein et de Stuttgart en Allemagne, M. Khurshudyan à Kiev, M. Parker à Washington et M. Sly à Londres. Paul Sonne et Olivier Knox à Washington, Souad Mekhennet à Berlin, Rick Noack à Paris et Serhiy Morgunov à Kiev ont contribué à ce rapport.
Image Quand on a un javelin dans la main, tous les problèmes ressemblent à un T-72.

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Re: Les SR Américains sur les intentions Russes en Ukraine fin 2021

Message par alain2908 » 17 août 2022, 06:51

C'est passionnant,
merci

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GillesH38
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Re: Les SR Américains sur les intentions Russes en Ukraine fin 2021

Message par GillesH38 » 17 août 2022, 08:30

Oui très interessant, du journalisme américain dans ce qu’il a de meilleur

J’attend avec intérêt de savoir si C3P ou Léger ont des sources rapportant de façon parallèle comment la préparation de l’opération a été vécue du côté russe ?
Zan, zendegi, azadi. Il parait que " je propage la haine du Hamas".

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