Ah j'avais loupé ca le mois dernier, excellent état des lieux :
Hyperloop n’est pas adapté à l’Europe de l’Ouest, selon une étude de Leonard
Le think-tank Leonard dévoilera une étude complète sur Hyperloop, jeudi 24 juin. Pour l’Usine Nouvelle, Pierre Delaigue, directeur des projets de mobilités connectée, autonome et électrique chez Leonard, évoque les idées fortes de cette enquête.
Olivier Cognasse 23 Juin 2021 Usine Nouvelle
"Hyperloop – les défis du transport terrestre hyper rapide", l’étude réalisée par les équipes de Leonard, la plate-forme d’innovation de Vinci et plusieurs entités du groupe, évoque l’avenir de ce concept lancé par Elon Musk en 2013.
Elle commence par rappeler que depuis un siècle des recherches sont menées pour développer un moyen de transport terrestre sans frottement, entraîné par un champ magnétique. En 1914, Emile Bachelet construisait un démonstrateur du premier train à sustentation magnétique. En 2015, un Maglev japonais série L0 atteint 603 km/h… seulement 4,4 % plus rapide que le record du TGV (574,8 km/h en 2007). Une première ligne entre Tokyo et Nagoya, distantes de 258 km, devrait voir le jour en 2027 pour relier les deux métropoles en 40 minutes.
La vitesse maxi revue à la baisse
"Nous nous sommes intéressés aux différents défis - technologies, sécurité, économie et territoires. Sur les territoires, nous concluons que ce ne sont pas les régions maillées par le ferroviaire et l’aérien, comme l’Europe de l’Ouest qui devraient intéresser les acteurs de ce mode de transport qui n’est ni un train, ni un avion, prévient Pierre Delaigue, directeur des projets de mobilités connectée, autonome et électrique chez Leonard, qui a piloté l’étude. C’est pourquoi ils s’intéressent davantage à la Chine de l’Ouest, au Moyen-Orient, au Canada et aux Etats-Unis."
Le concurrent d’Hyperloop est le transport aérien court courrier, sur des distances de 1000 à 2000 kilomètres. Mais avec une vitesse qui finalement serait moindre par rapport aux 1120 km/h avancés par Elon Musk. "Hormis l’espagnol Zeleros et le polonais Nevomo qui communiquent encore sur cette vitesse, les autres acteurs parlent plutôt de 700 à 800 km/h, car le surcoût exponentiel pour un faible gain de temps pour les passagers ne se justifie pas."
Six acteurs dont trois européens
Aujourd’hui six acteurs travaillent sur ce concept, dont trois européens – l’espagnol Zeleros, le néerlandais Hardt Hyperloop et le polonais Nevomo – et deux entreprises sont implantées en France, le canadien Transpod et l’américain Hyperloop Transportation Technologies (HTT). La dernière est également américaine. Il s’agit de Virgin Hyperloop One (VHO). Au total, elles ont déjà levé 450 millions d’euros de financement. L’étude considère qu’à terme, il ne restera qu’un ou deux acteurs majeurs.
Alors que certains pensaient lancer les premiers services commerciaux au milieu de la décennie, ce calendrier n’est plus d’actualité. "Nous aurons les premiers tronçons pilotes d’ici 2030, explique l'auteur de l'étude." Ensuite, si tous les obstacles sont levés, les premiers services commerciaux devraient suivre. Aujourd’hui, le démonstrateur de VHO est à ce jour le seul à avoir transporté des personnes, en l’occurrence deux membres de l’équipe. C’était le 8 octobre 2020, sur 500 mètres et à une vitesse de … 172 km/h. "Actuellement, les démonstrateurs en cours restent à échelle réduite ou de longueur limitée. Il faudra encore plusieurs années pour en voir fonctionner un à l’échelle 1 sur des trajets de plusieurs kilomètres, prévient Pierre Delaigue. C’est un nouveau mode de transport en totale rupture avec ce qui existe aujourd’hui. Plusieurs acteurs prévoient de commencer par le fret, c’est notamment le cas de Hardt qui imagine un réseau partant des Pays-Bas et qui relierait à terme toute l’Europe de l’Ouest."
Il reste de nombreuses question à régler sur la sécurité comme le freinage d’urgence entre deux capsules, le contrôle géométrique périodique face au risque sismique, celui de la pression, les risques sanitaires éventuellement provoqués par l’exposition des personnes aux champs magnétiques … Des actions sont aujourd’hui en cours aux Etats-Unis et en Europe pour définir des normes.
Dépasser le stade du projet ?
Les obstacles à lever sont encore nombreux. Le coût des infrastructures est estimé à 30 millions d’euros par kilomètre si une partie est aérienne. Les contraintes se multiplient : les rayons de courbures sont beaucoup plus importants que pour un TGV, et la construction nécessite des pylônes pour les parties aériennes et des souterrains pour épouser les reliefs, ce qui confirme que ce mode de transport est adapté à une géographie sans relief. Pierre Delaigue revient aussi sur la mise sous vide au moins partielle qui pose " la question énergétique et pénaliserait Hyperloop, même si ses émissions resteraient bien inférieures à celle de l’aérien aujourd’hui." D’après les estimations des constructeurs reprises par Leonard, Hyperloop serait plus de sept fois plus énergivore qu’un TGV et 1,34 fois plus que l’avion.
L’étude revient aussi sur le contexte sanitaire et la chute de la fréquentation des transports qui pénalise le développement d’Hyperloop et risque de réduire l’attrait des investisseurs. Autre souci : pour être réellement concurrentiel par rapport au train à très grande vitesse et à l’avion, les capsules devront arriver en centre-ville, ce qui en raison du coût du foncier augmentera encore l’investissement. Et les auteurs de l’étude se posent la question cruciale : Hyperloop peut-il dépasser le stade du projet ? Nous n’avons pas encore la réponse.
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