Politique(s) européenne(s) de l'énergie.

Discussions traitant des diverses sources d'énergie ainsi que de leur efficacité.

Modérateurs : Rod, Modérateurs

Avatar de l’utilisateur
MadMax
Modérateur
Modérateur
Messages : 2989
Inscription : 12 août 2005, 08:58
Localisation : Dans un cul-de-sac gazier

Message par MadMax » 10 févr. 2006, 21:51

EU commission shrugs off looming oil shortage as 'just a theory'
EU admits having no plan for 'peak oil' crisis



Green Party UK press release
The EU's energy commissioner Andris Piebalgs has admitted he has no plan to deal with rapidly rising oil and gas prices in the face of shrinking supply and booming demand.

In a response to a parliamentary question put by Green Party MEP Caroline Lucas, he shrugs off the so-called 'Peak Oil' scenario as 'no more than a theory'.

Dr Lucas, an MEP for South-East England and a member of the European Parliament's Environment and International Trade Committees, said: "The Commission's attitude represents a frightening dereliction of duty.

"An increasing number of scientists and energy experts are warning that declining oil production, public over-statements of oil reserves and booming demand for oil and gas in China and India mean that the point of 'Peak Oil' - when growing demand for oil outstrips falling supply - will occur sooner than is openly suggested.
(9 February 2006)
:-(

Avatar de l’utilisateur
Tiennel
Modérateur
Modérateur
Messages : 5011
Inscription : 12 mars 2005, 00:37

Message par Tiennel » 17 févr. 2006, 22:30

Le Monde daté du 17 février 2006 a écrit :Bruxelles persiste à vouloir libéraliser le secteur de l'énergie

C'est un coup de semonce pour les anciens monopoles, comme EDF, Gaz de France, E.ON et RWE en Allemagne : sans nommer ni les Etats ni les entreprises concernées, Neelie Kroes, la commissaire chargée de la concurrence, a annoncé, jeudi 16 février à Bruxelles, sa volonté de multiplier les poursuites contre les opérateurs de l'énergie peu soucieux de libéraliser le secteur.

"La commission va prochainement lancer des investigations antitrust", a indiqué Mme Kroes, afin de mettre un terme aux ententes et abus de position dominante identifiés dans le cadre d'une enquête en cours. Ces actions doivent avoir, selon elle, "des effets palpables et immédiats, tout en créant des précédents valables", notamment dans le domaine des contrats d'approvisionnement à long terme, des capacités de pipeline, de stockage du gaz et d'interconnexions.

Les autorités de la concurrence tentent ainsi de se placer au centre des débats sur la politique européenne afin de parachever la libéralisation des marchés du gaz et de l'électricité. Une tâche délicate tandis que plusieurs Etats appellent, au contraire, à mieux coordonner les approvisionnements de l'Union, et renforcer les entreprises européennes face à des géants comme le russe Gazprom.

CINQ DYSFONCTIONNEMENTS GRAVES

Pour Mme Kroes, la hausse des tarifs constatée ces derniers mois n'est pas seulement due à l'envolé des tarifs du pétrole et du gaz, mais aussi "à des pratiques anticoncurrentielles". Car l'ouverture des marchés lancée pendant les années 1990 n'a pas, d'après elle, produit tous ses effets.

En lien avec le commissaire à l'énergie Andris Piebalgs, qui s'interroge sur l'opportunité d'une nouvelle législation, les services de la concurrence ont identifié cinq "dysfonctionnements graves".

D'abord, les entreprises et les consommateurs ont une confiance limitée dans les mécanismes de formation des prix sur les marchés de gros, où les tarifs ont augmenté. Ensuite, les marchés du gaz et de l'électricité sont toujours très concentrés. Dans certains Etats, comme en Espagne avec la fusion entre Gas Natural et Endesa, les autorités donnent leur bénédiction à la constitution de champions nationaux : Mme Kroes suggère de "modifier la législation européenne" pour contrôler ce genre de fusions au niveau européen.

Par ailleurs, nombre de marchés de gros manquent de liquidité, soit en raison de contrats à long terme (gaz) soit parce que les compagnies, à l'instar d'EDF, opèrent à la fois dans la production et sur le marché de détail, ce qui limite le développement des marchés de gros (électricité). "Les propriétaires et les exploitants de réseaux sensibles sont souvent en compétition avec les sociétés qui ont besoin d'un accès à ces infrastructures", regrette Mme Kroes, en plaidant pour un "dégroupage structurel" total. En outre, les entraves à la fourniture transfrontalière de gaz et d'électricité freinent le développement de marchés intégrés.

Enfin, Bruxelles juge que le manque de transparence des marchés profite aux opérateurs en place.
:roll:
Méfiez-vous des biais cognitifs

Avatar de l’utilisateur
MadMax
Modérateur
Modérateur
Messages : 2989
Inscription : 12 août 2005, 08:58
Localisation : Dans un cul-de-sac gazier

Message par MadMax » 21 févr. 2006, 19:42

L'allemand E.ON vient croquer le champion de l'énergie espagnol
par Julia Hayley


MADRID (Reuters) - L'émergence d'un champion national de l'énergie en Espagne, à laquelle le gouvernement avait apporté sa bénédiction, a pris un rude coup avec l'irruption du chevalier blanc E.ON au secours de la compagnie d'électricité Endesa.

La contre-offre en cash de 29,1 milliards d'euros du groupe allemand supplante largement les 22 milliards d'euros que proposait Gas Natural, essentiellement en titres, pour acquérir son compatriote.

Le gouvernement aurait pu, s'il l'avait souhaité, empêcher Gas Natural de mettre la main sur Endesa, mais il ne pourra pas faire grand chose contre E.ON. Et au lieu d'avoir le groupe d'énergie "fort, puissant et compétitif à l'international" que le Premier ministre Jose Luis Rodriguez Zapatero appelait de ses voeux, il risque de se retrouver avec des acteurs affaiblis - et opéables.

Si Endesa est avalé par E.ON, Gas Natural comme Iberdrola - le deuxième producteur espagnol d'électricité - pourraient se retrouver en situation de proies pour des grands groupes étrangers à l'appétit renforcé par les grandes manoeuvres en cours.

Sans les 8 milliards d'euros d'actifs d'Endesa que Gas Natural comptait lui vendre, Iberdrola perdra beaucoup de sa puissance. Et Gas Natural sortirait forcément affaibli d'un tel échec, d'autant qu'il est vital pour lui de se développer dans la production d'électricité.

La Bourse ne s'y est pas trompée en faisant gagner jusqu'à 2% au titre du groupe gazier, qui a finalement terminé en repli de 0,21% à 24,30 euros. "L'action a monté car l'acquéreur devient tout à coup une cible", observait Javier Galan, gérant chez Renta 4.

UN TEST POUR ZAPATERO

L'OPA d'E.ON sera l'occasion de tester les convictions du gouvernement socialiste en matière de libre-entreprise.

En novembre, il a décidé de supprimer l'action spécifique (golden share) qui lui permettait de conserver un pouvoir sur les anciens monopoles d'Etat, dont Endesa, et il a demandé au Parlement de légiférer rapidement sur ce point. Mais techniquement, la golden share dans Endesa reste valable jusqu'en juin 2007.

Interrogé sur cette particularité, le patron d'E.ON, Wulf Bernotat, a dit avoir du mal à imaginer que Madrid ne laisse pas les actionnaires d'Endesa décider.

Le Parti populaire, principale formation de l'opposition, ne s'est pas privé de critiquer le pouvoir en relançant la controverse sur Endesa et Gas Natural.

"Le gouvernement, par son incompétence, est seul responsable de cette nouvelle offre", a déclaré Miguel Arias Canete, porte-parole du PP pour les affaires économiques.

En prenant fait et cause pour Gas Natural, basé à Barcelone, le pouvoir s'était vu accuser de faire des concessions aux partis politiques catalans dont le soutien lui est crucial.

E.ON n'ayant pas d'activités importantes en Espagne et Endesa étant absent d'Allemagne, l'OPA ne devrait pas poser de problèmes de concurrence, disent les analystes en notant que la Commission européenne seule aura son mot à dire.

"Le gouvernement n'a pas beaucoup de moyens disponibles pour bloquer l'offre. La Commission (espagnole) de l'Energie devra l'examiner mais je pense qu'E.ON pourra surmonter cet obstacle sans trop de difficulté", dit un analyste qui demande à ne pas être cité.

"Toute tentative du gouvernement d'imposer des limites entraînerait un conflit avec l'Union européenne", ajoute-t-il.
C'est bien, mangez-vous entre Européens, Gazprom dépensera moins d'argent dans les conseils des banques d'affaires, vu qu'il n'y aura plus que 3-4 opérateurs à croquer tout cru :twisted:

Avatar de l’utilisateur
MadMax
Modérateur
Modérateur
Messages : 2989
Inscription : 12 août 2005, 08:58
Localisation : Dans un cul-de-sac gazier

Message par MadMax » 21 févr. 2006, 19:48

Gas Natural maintient son offre sur Endesa

MADRID, 21 février (Reuters) - Gas Natural a annoncé mardi maintenir son offre d'achat de 22 milliards d'euros sur la compagnie d'électricité Endesa, en dépit de la surenchère du groupe allemand E.ON , qui offre quelque sept milliards de plus.

Le numéro un espagnol du gaz, qui n'a apporté aucune modification aux termes de son offre, ajoute qu'il prendra en compte les intérêts de ses actionnaires dans ses futures décisions./MA
Repsol qui révise en baisse ses réserves de pétrole, Gas Natural qui se fait bousculer, Iberdrola affaibli : un Trafalgar énergétique ? :twisted:

Avatar de l’utilisateur
MadMax
Modérateur
Modérateur
Messages : 2989
Inscription : 12 août 2005, 08:58
Localisation : Dans un cul-de-sac gazier

Message par MadMax » 13 mars 2006, 19:49

Bruxelles relance l’idée d’une politique énergétique européenne

Les ministres de l'Energie des 25, sommés cette semaine par la Commission européenne d'unir davantage leurs forces, planchent mardi à Bruxelles sur les moyens de renforcer la sécurité d'approvisionnement d'une UE toujours plus dépendante de l'extérieur.

Les Etats membres, jaloux de leurs prérogatives sur des questions stratégiques comme les stocks de gaz et de pétrole, ont toujours freiné jusqu'ici la mise en place d'une véritable politique énergétique européenne.
Mais les récents développements sur la scène internationale - de la flambée des prix du brut à la récente crise gazière russo-ukrainienne qui a perturbé l'approvisionnement de certains d'entre eux - les ont placé au dos du mur.

Dans un "Livre vert" sur l'énergie présenté cette semaine, qui servira de base à la réunion des ministres, la Commission exhorte les 25 à "parler d'une seule voix" à l'international et à renforcer le dialogue avec leurs partenaires, surtout la Russie, d'où vient le 1/4 des importations européennes de gaz.
Une requête qui prend tout son poids à la veille d'une réunion du G8 sur l'énergie et d'une visite à Moscou du président de la Commission européenne, José Manuel Durao Barroso.
"Nous avons besoin d'un nouveau partenariat avec la Russie", estime M. Barroso (tu vas pas être déçu :twisted: ), qui entend expliquer vendredi au président Vladimir Poutine qu'en "matière d'énergie, comme dans beaucoup d'autres domaines, nous avons des intérêts communs, nous devons maximiser notre coopération".
La Commission milite pour que les Etats membres fassent front commun face à l'extérieur, mais elle les exhorte aussi à s'attaquer, chez eux, aux dysfonctionnements du marché intérieur de l'énergie.
Car ces dysfonctionnements aussi peuvent avoir de sérieuses conséquences sur la sécurité d'approvisionnement des citoyens. En 2003, l'Italie avait été plongée dans le noir à la suite de problèmes d'interconnexions de réseaux électriques entre pays européens.
La Commission, dont le "Livre vert" alimentera aussi le sommet européen des 23 et 24 mars, veut plus de solidarité entre les 25. Elle envisage ainsi une révision des règles sur les stocks de gaz et de pétrole mais demande aussi des efforts en matière de concurrence.
Depuis une dizaine d'années, l'UE s'est engagée dans une politique de libéralisation des marchés du gaz et de l'électricité, qui devront être totalement ouverts à la concurrence en juillet 2007, y compris pour l'usager particulier. Mais l'exécutif européen dénonce des niveaux d'ouverture encore très différents d'un pays à l'autre.

Au moment où les grandes manoeuvres dans le secteur - de l'offensive de l'allemand E.ON sur l'espagnol Endesa aux ambitions de l'italien Enel sur le français Suez - ont réveillé les patriotismes économiques nationaux, Bruxelles prône "l'ouverture" plutôt que "le protectionnisme".
Pour que les consommateurs puissent effectivement se fournir dans un autre Etat membres que le leur, il est temps d'assurer un accès non-discriminatoire pour tous les opérateurs gaziers et électriques aux différents réseaux nationaux, juge Bruxelles.
Là, des efforts sont nécessaires pour assurer l'indépendance des régulateurs (comme la Commission de régulation de l'énergie en France), harmoniser leurs pouvoirs, voire mettre en place un "régulateur énergétique européen" pour examiner les questions transfrontalières.
Mais la naissance d'un régulateur unique en matière d'énergie reste totalement taboue dans plusieurs pays comme la France, ce qui promet encore de longs et difficiles débats.
"Beaucoup de pays risquent de trouver que cela va trop loin et qu'il vaudrait mieux, dans un premier temps, harmoniser" simplement les "compétences" des régulateurs, résume une source diplomatique.
Aude Genet (AFP)

(13/03/2006)
Le Moniteur

Avatar de l’utilisateur
MadMax
Modérateur
Modérateur
Messages : 2989
Inscription : 12 août 2005, 08:58
Localisation : Dans un cul-de-sac gazier

Message par MadMax » 15 mars 2006, 15:40

Ni pétrole ni idées


Pascal Aubert


Les Européens ont beau constater - pour s'en inquiéter chaque jour davantage - leur dépendance énergétique grandissante vis-à-vis du reste du monde, ils n'en jugent pas utile pour autant d'y remédier par des mesures de bon sens.

On peut s'étonner que, plus de 30 ans après le premier choc pétrolier, les pays de l'Union européenne n'aient pas encore trouvé le moyen de se doter de stocks communs de pétrole et de gaz, ou simplement d'un système mutualisé de gestion des réserves nationales existantes, permettant de lisser les fluctuations erratiques des cours du baril. En dépit des avantages évidents d'une politique énergétique commune, l'égoïsme demeure la règle absolue, chaque État veillant jalousement sur ses ressources au prétexte qu'on touche là à ses intérêts vitaux et à sa sécurité nationale.

Comme si, dans une communauté de nations où les biens, les personnes et les capitaux circulent librement, chacun pouvait encore prétendre jouer solo. Comme si dans un ensemble économique où la prospérité de chacun dépend de plus en plus étroitement de celle de ses voisins, les intérêts d'un État pouvaient être plus solidement protégés en faisant abstraction de ceux de ses partenaires. Et l'indifférence polie qui a accueilli il y a quelques jours la publication du livre vert sur l'énergie présenté par la Commission de Bruxelles augure mal d'un changement d'attitude. Le refus d'envisager la création d'une autorité commune de régulation du marché de l'électricité signifié hier par une majorité de ministres de l'Énergie de l'UE participe de cette myopie qui semble affecter nombre de pays européens face aux défis énergétiques des prochaines décennies.

Les crispations nationales récentes observées sur les cas Endesa en Espagne et Suez-GDF en France témoignent à leur manière de cette propension à vouloir inscrire dans un cadre strictement national le traitement des questions énergétiques qui, parce qu'elles sont communes à tous, justifieraient une approche collective au sein de l'Union européenne. On en est encore loin.

Et vendredi lorsque le président de la Commission de Bruxelles se rendra à Moscou pour évoquer l'idée d'un partenariat énergétique de long terme, il pourra mesurer tout l'inconfort de sa position. Et, malheureusement, ses interlocuteurs russes aussi.
La Tribune

bielsa
Kérogène
Kérogène
Messages : 20
Inscription : 27 févr. 2006, 11:48

Message par bielsa » 16 mars 2006, 11:02


Avatar de l’utilisateur
MadMax
Modérateur
Modérateur
Messages : 2989
Inscription : 12 août 2005, 08:58
Localisation : Dans un cul-de-sac gazier

Message par MadMax » 23 mars 2006, 18:13

Le Parlement espagnol adopte un décret empêchant le rachat d'Endesa par E.On

Le Parlement espagnol a adopté jeudi un décret présenté par le gouvernement pour empêcher le géant allemand de l'énergie E.On d'acquérir le groupe électrique espagnol Endesa, au risque de s'attirer les foudres de l'Union européenne pour ce "patriotisme économique" qui va à l'encontre d'une politique énergétique régionale.

Le texte était entré en vigueur 4 jours après son approbation par le cabinet le 24 février mais il devait aussi obtenir le feu vert officiel du Congrès des députés (chambre basse).

Le gouvernement socialiste de Madrid estime qu'Endesa doit rester espagnol et soutient donc l'offre publique d'achat (OPA) hostile du distributeur catalan Gas Natural pour 22 milliards d'euros, antérieure à celle d'E.On d'un montant de 29,1 mds d'euros.

L'exécutif a laissé passer la semaine dernière le délai qui lui était imparti par l'Union européenne pour s'expliquer sur ce décret qui permettra également aux autorités espagnoles de régulation de se prononcer sur des offres d'investisseurs étrangers sur des sociétés des secteurs régulés par l'Etat tels que le gaz et l'électricité.

La Commission européenne a suggéré qu'elle prendrait des mesures contre l'Espagne pour discrimination à l'encontre des sociétés étrangères. AP
Le bordel. Et il n'y a pas encore de pénurie.

Avatar de l’utilisateur
Tiennel
Modérateur
Modérateur
Messages : 5011
Inscription : 12 mars 2005, 00:37

Message par Tiennel » 03 avr. 2006, 22:39

Je suis tombé sur un projet d'article en français de l'incontournable Jerome a Paris. Le post date du 18 mars mais ça reste très actuel ! N'hésitez pas à poster vos remarques à JaP directement sur son blog.
Jerome a Paris a écrit :Politique énergétique : Blair et Barroso veulent faire payer à la France leur irresponsabilité

Depuis le conflit apparent entre la Russie et l'Ukraine en début d'année, et dans un contexte de prise de conscience que les prix élevés du pétrole vont durer, l'énergie est un sujet à la mode pour nos dirigeants, et en particulier pour le gouvernement de Tony Blair, qui se débat dans une crise énergétique profonde (les prix du gaz ont quadruplé la semaine dernière), et pour la Commission Européenne, qui veut pousser une politique incohérente de libéralisation et de « coordination » dont le seul but semble être de casser les politiques nationales existantes, en particulier celle, la plus cohérente, de la France.

Les différentes opérations de fusion-acquisition dans le secteur (achat d'Endesa par Gas Natural, puis contre-offre d'E.On ; fusion Suez-GDF pour empêcher le rachat de Suez par l'Enel ; fusion du secteur énergétique danois sous l'égide de DONG, opérateur public ; velléités de rachat de Centrica par Gazprom) ont permis de lancer la charge, avec des accusations de protectionnisme lancées par les libéraux contre la France et l'Espagne (mais, bizarrement, pas contre le Royaume-Uni, qui a eu une réaction totalement protectionniste contre Gazprom). La présentation la semaine dernière du Livre Vert de la Commission Européenne a renforcé l'offensive, avec deux points qui dominent : la nécessité de mener à bien la libéralisation du marché intérieur de l'énergie (et donc de combattre le supposé « nationalisme » de certains pays), et la suggestion de mieux coordonner le marché via un régulateur commun, qui pourrait également parler d'une voix face aux partenaires extérieurs (la Russie en particulier).

Les appels dans le Livre Vert à une meilleure coordination des réseaux électriques et gaziers, à la constitution de réserves stratégiques de gaz et la mise en place de mécanismes de réaction et de solidarité en cas de crise sont de bon aloi, mais révèlent, dans le contexte d'un désir maintenu de libéraliser le secteur, une profonde hypocrisie. Le prétexte est la « dépendance croissante » de l'Union Européenne envers les importations, qui est réelle, mais qui provient essentiellement de l'épuisement des réserves de la Mer du Nord. La France, l'Allemagne, l'Italie ou l'Espagne doivent gérer depuis de nombreuses années une dépendance quasi-totale envers les importations d'hydrocarbures, et ont mis en place des politiques ad hoc : diversification des sources d'énergie et des fournisseurs, recours au nucléaire, constitution de groupes puissants capables de négocier avec les monopoles nationaux dans le secteur pétrolier et gazier. La France, en particulier, a poursuivi avec succès toutes ces options. Même les Pays-Bas, exportateurs nets de gaz, ont mené une politique nationale de rationnement de leur production afin de préserver leurs réserves. La crise de dépendance énergétique de l `Europe est essentiellement une crise britannique : le pays, protégé pendant des années par sa position enviable de producteur d'hydrocarbures, a poussé à la libéralisation, avantageuse en période d'abondance, et n'a pas songé au futur. Frappée aujourd'hui par des pénuries de gaz et des hausses de prix vertigineuses (le prix du gaz a été multiplié par 4 en début de semaine en raison d'une vague de froid, après la mise hors service d'un site de stockage suite à un incident technique), le pays se retrouve nu et cherche à blâmer les autres pays européens pour son imprévoyance.

Le marché garantit des prix plus « justes » pour une demande et une offre à un moment donné, pas des prix plus bas comme le prétendent systématiquement les apôtres du marché. Aujourd'hui, les tensions mondiales entraînent les prix à la hausse et les marchés libéralisés répercutent ces hausses à plein. Les anglais blâment les Pays-Bas parce qu'ils privilégient leur demande intérieure aux super-profits qu'ils pourraient faire en vendant leur gaz au Royaume-Uni, et illustrent l'incompatibilité absolue des objectifs affichés : libéralisation, ou coordination.

Pour reprendre l'exemple russe, la Commission Européenne suggère de coordonner les négociations au nom de l'Europe. Pourquoi pas ? Mais en quoi est-ce une solution libérale d'imposer un interlocuteur public comme acheteur du gaz russe ? Comment va-t-il allouer le gaz moins cher qu'il réussirait à extorquer aux russes ? Et qui décidera des stratégies de négociations Les pays qui consomment du gaz ? Les pays qui importent du gaz ? Les pays qui importent du gaz russe ? Les pays de transit du gaz russe ? Imposer un « coordinateur européen » avant d'avoir résolu ces questions fondamentales est absurde. L'objectif transparent est donc de supplanter Paris et Berlin - et émasculer GDF et E.On-Ruhrgas, les interlocuteurs habituels de Gazprom - dans les discussions existantes avec la Russie. Or la relation avec la Russie ne nécessite pas aujourd'hui de changement particulier : Gazprom n'a pas d'autre acheteur que l'Europe (tous ses gazoducs vont vers l'Europe, et le GNL représentera pour très longtemps une fraction infime des exportations russes), et a tout autant intérêt que ses clients à avoir des relations stables, dans le cadre de contrats de long terme avec des formules de prix prévisibles (les formules actuelles sont de facto indexées sur le prix du pétrole, ce qui permet à tous d'utiliser tous les instruments de couvertures existant sur ce marché). Le Royaume-Uni, qui n'a pas encore signé de contrat avec les russes mais souhaite le faire, cherche simplement à faire baisser le prix du transit via l'Allemagne et le Benelux. L'objectif n'est pas la « vérité des prix », mais la crainte d'une dépendance envers ces pays partenaires...

En ce qui concerne l'électricité, il est bon de rappeler qu'il s'agit d'un bien très particulier, avec des contraintes techniques qui imposent en toutes circonstances une régulation très forte. Le réseau est un monopole naturel, qui impose de mettre en place une autorité centrale (l'opérateur de réseau) capable d'allouer les capacités disponibles aux différents acteurs de manière équitable dans le respect des besoins techniques.
  • l'électricité ne peut pas être stockée, ce qui impose qu'à tout moment, l'offre soit égale à la demande. L'opérateur du réseau doit donc avoir le pouvoir, à tout moment, de rajouter ou d'enlever des capacités de production pour s'ajuster à la demande - sans que les producteurs concernés puissent s'y opposer ;
  • les coupures de courant ne sont pas tolérables. L'électricité est un bien vital pour le fonctionnement de nos économies et pour notre vie quotidienne, et toute disparition au-delà d'incidents localisés et temporaires créé immédiatement une crise économique et politique majeure. Cela impose, de nouveau, que l'opérateur du réseau (ou le régulateur) puisse imposer que des capacités de production de réserve suffisantes soient disponibles à tout moment, et que des normes sévères de qualité sur le courant produit s'imposent à tous.
Ces exigences ont un coût, et ne sont pas compatibles avec une totale liberté de spéculer sur l'électricité. Mettre un prix - ou choisir un mode de fixation des prix - sur les capacités de réserve de court et de moyen terme est une décision politique fondamentale. Les anglais ont libéralisé dans un contexte de capacités de production temporairement excédentaires (grâce aux investissement français dans un parc nucléaire surdimensionné pour les besoins immédiats) et ont pu ainsi obtenir une baisse des prix artificielle, et clamer la supériorité des « marchés ». Venir ensuite demander une « solidarité » européenne quant la crise inévitable causée par leur sous -investissement approche est d'une malhonnêteté absolue.

Notons ici que le choix imposé par les libéraux et la Commission Européenne d'interdire le financement public des entreprises énergétiques revient de facto à imposer certains choix techniques. Les centrales au charbon et au gaz ont des coûts de financement plus faibles (que le nucléaire ou l'éolien, qui nécessitent des investissements initiaux élevés mais coûtent ensuite beaucoup moins cher en coûts opératoires et coûts de combustible), et sont donc privilégiées par les acteurs privés et leurs financiers. Renoncer au financement public du secteur va donc à l'encontre des politiques de réduction des émissions des gaz à effet de serre et de la dépendance envers les exportateurs d'hydrocarbures. Un des éléments positifs du Livre Vert (complètement ignoré dans les débats actuels) est pourtant l'attention toute particulière qui est portée à la promotion des énergies renouvelables et des économies d'énergie, qui sont les seules vraies solutions de long terme.

La France a donc bien raison d'ignorer les éructations hypocrites de Londres et Bruxelles et de continuer sa politique, cohérente, de maintien d'acteurs forts, liés à la puissance publique, ce qui permet d'assurer une stratégie d'investissement de long terme, une régulation forte du réseau et de la sécurité des centrales, le maintien d'une force de travail qualifiée, bien traitée (et donc sensible aux questions de maintien du service pour tous et de qualité) et capables d'assurer une diversité des sources d'approvisionnements - et les prix les plus bas d'Europe.

Les accusations de Bruxelles et Londres s'intègrent dans l'offensive tous azimut que mènent les néo-libéraux pour présenter la France comme étant en faillite économique ; il s'agit d'un combat éminemment idéologique et la France, porteuse d'une alternative qui fonctionne bien, en particulier dans le secteur énergétique, doit absolument être démonisée. Mais l'Europe serait pourtant mieux servie par une extension du modèle français que du modèle anglais.
Méfiez-vous des biais cognitifs

Avatar de l’utilisateur
MadMax
Modérateur
Modérateur
Messages : 2989
Inscription : 12 août 2005, 08:58
Localisation : Dans un cul-de-sac gazier

Message par MadMax » 04 avr. 2006, 20:52

Energie : Bruxelles tape sur la table

La Commission européenne a mis mardi ses menaces à exécution et lancé des procédures d'infraction contre 17 Etats de l'Union européenne pour avoir tardé à ouvrir à la concurrence leurs marchés du gaz et de l'électricité.

Lors de leur réunion hebdomadaire, les commissaires européens ont décidé mardi à Strasbourg d'envoyer à 17 Etats membres "des lettres de mise en demeure", première étape d'une procédure d'infraction.
Les mauvais élèves ont 2 mois pour se justifier. Si Bruxelles juge alors qu'ils ne jouent toujours pas le jeu du marché, elle pourra décider d'envoyer un deuxième avertissement ou "avis motivé" puis, en dernier ressort, de saisir la Cour européenne de Justice.
La Commission, qui a fait une priorité de la politique européenne de l'énergie en mars, explique dans un communiqué qu'elle a décidé d'"attaquer les Etats membres n'ayant pas ouvert correctement leurs marchés de l'énergie".
Plus précisément, elle entre en guerre contre ceux qui ont mal transposé dans leur droit national la directive européenne prévoyant une ouverture totale à la concurrence les marchés du gaz et de l'électricité au 1er juillet 2007, ou en ont fait une mauvaise application.
Des lettres ont ainsi été envoyées mardi à l'Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l'Italie, l'Espagne, l'Autriche, la Belgique, la Grèce, l'Irlande, la Finlande, la Suède, la Pologne, la Lituanie, la Lettonie, l'Estonie, la République tchèque et enfin la Slovaquie.

Pour le commissaire à l'Energie, Andris Piebalgs, il est "crucial" que les Etats membres mettent en oeuvre "rapidement et intégralement les directives" sur l'énergie" tant "dans la forme que sur le fond".
Pour la Commission, "un approvisionnement durable, compétitif et sûr en énergie ne sera pas possible en l'absence de marchés énergétiques ouverts et concurrentiels permettant aux entreprises européennes de devenir des concurrents à l'échelle européenne plutôt que des acteurs dominants au niveau national".
Pour Bruxelles, il subsiste "encore beaucoup de différences entre les approches des Etats membres en matière d'ouverture qui empêchent l'émergence d'un marché européen véritablement concurrentiel. Or, estime-t-elle, "la création d'un tel marché est déterminante pour la baisse des prix de l'énergie".
Selon Bruxelles, les problèmes les plus courants sont la persistance de prix réglementés, la préférence accordée aux anciens monopoles, la discrimination à l'encontre des nouveaux entrants, une indépendance insuffisante entre le transport et la distribution de gaz et d'électricité, ainsi qu'une médiocre transparence des tarifs.
Plus largement, ce sont 20 Etats sur 25 que la Commission a décidé de harponner mardi. Parallèlement aux procédures d'infraction sur le volet marché intérieur, elle a également lancé des procédures liées à l'environnement.

8 pays vont cette fois recevoir des "mises en demeure" pour n'avoir pas suffisamment développé les énergies renouvelables. Il s'agit de l'Italie, de la Pologne, de la République tchèque, du Royaume-Uni, de la Lettonie, de la Grèce, de l'Irlande et de Chypre.
L'UE s'est fixée pour objectif de produire 21% de l'électricité à partir de sources d'énergie renouvelable d'ici 2010, contre 14% aujourd'hui.
En outre, la Commission a épinglé la Finlande, le Danemark, l'Italie et le Luxembourg, pour le rôle insuffisant accordé aux biocarburants.

La part des biocarburants sur le marché du diesel et de l'essence de l'UE était inférieure à 1% en 2004, alors que l'UE s'est fixée un objectif de 2% pour 2005 et de 5,75% pour 2010.
Enfin, la Commission a rappelé à l'ordre la Belgique et Chypre pour ne pas maintenir de stocks pétroliers suffisants, nécessaire à la sécurité d'approvisionnement de l'UE.
(04/04/2006)

Avatar de l’utilisateur
Tiennel
Modérateur
Modérateur
Messages : 5011
Inscription : 12 mars 2005, 00:37

Message par Tiennel » 04 avr. 2006, 22:20

La Commission Européenne a écrit :un approvisionnement durable, compétitif et sûr en énergie ne sera pas possible en l'absence de marchés énergétiques ouverts et concurrentiels permettant aux entreprises européennes de devenir des concurrents à l'échelle européenne plutôt que des acteurs dominants au niveau national
Personnellement, je serai incapable de dire des choses pareilles en gardant mon sérieux. Alles klar, Herr Kommissar ?
Méfiez-vous des biais cognitifs

franck1968
Hydrogène
Hydrogène
Messages : 1430
Inscription : 05 nov. 2005, 10:29

Message par franck1968 » 05 avr. 2006, 23:07

Sommet national sur l'énergie à Berlin : plusieurs milliards d'euros d'investissements pour préparer l'avenir

Le gouvernement allemand et les chefs de grandes entreprises énergétiques et industrielles d'Allemagne se sont accordés hier sur des investissements concrets de plusieurs milliards d'euros pour préparer l'avenir de l'approvisionnement énergétique en Allemagne. Les fournisseurs d'énergie ont accepté d'investir plus de 30 milliards d'euros d'ici à 2012 pour construire de nouvelles centrales et renforcer le réseau énergétique. Des investissements de 33 à 40 milliards d'euros devraient suivre pour développer les énergies renouvelables.

Le gouvernement fédéral a, en outre, décidé d'accroître de plus de 30 % d'ici à 2009 (soit 2 milliards d'euros sur la période 2006-2009) les moyens financiers destinés à la recherche sur l'efficacité énergétique et sur l'innovation technologique. Il consacrera aussi 1,4 milliard d'euros par an à la rénovation énergétique des bâtiments.

Le sommet national sur l'énergie avait pour vocation de donner le coup d'envoi à la préparation d'un concept énergétique global pour l'Allemagne à l'horizon 2020. "L'avenir de notre pays dépend d'un approvisionnement énergétique rentable, sûr et respectueux de l'environnement", a réaffirmé la chancelière Angela Merkel. Ministres et chefs d'entreprises ont travaillé dans une ambiance constructive et décidé de se revoir à l'automne. En attendant, trois groupes de travail défricheront le terrain sur les aspects internationaux et nationaux de la politique énergétique et sur le thème de l'efficacité énergétique. La sécurité des approvisionnements énergétiques en période de hausse des prix pétroliers et gaziers, ainsi que les changements climatiques rendent nécessaire une coopération forte aux niveaux européen et international, estime le gouvernement allemand. Il entend en faire l'un des thèmes de sa présidence du conseil européen et de sa prédidence du G-8 en 2007.



L'élaboration d'un projet énergétique global imposera aussi de trouver des solutions de substitution à l'énergie nucléaire, que l'Allemagne a décidé d'abandonner sous le gouvernement de Gerhard Schröder. Des débats, probablement contradictoires, sur les modalités de la sortie du nucléraire devraient être à l'ordre du jour dans ce cadre.

Avatar de l’utilisateur
MadMax
Modérateur
Modérateur
Messages : 2989
Inscription : 12 août 2005, 08:58
Localisation : Dans un cul-de-sac gazier

Message par MadMax » 05 avr. 2006, 23:19

L'Italie s'octroie une "golden share" dans Snam Rete Gas

MILAN, 5 avril (Reuters) - L'Etat italien, qui contrôle indirectement le groupe gazier Snam Rete Gas , s'est octroyé des pouvoirs spéciaux avec droit de veto en plein débat européen sur l'ouverture des marchés de l'énergie.

Le gouvernement, qui entend avec cette action spécifique ("golden share") pérenniser son contrôle du réseau de distribution de gaz avant la réduction programmée de ses parts, a adopté le 23 mars un décret autorisant l'Etat à bloquer toute tentative de prise de contrôle.

"Dans l'éventualité d'une perte de contrôle (...) une clause devrait être introduite dans les statuts du groupe accordant au ministère de l'Economie des pouvoirs spéciaux", précise le décret publié mardi dans le Journal officiel.

Le ministère exercera ce pouvoir en accord avec le ministère de l'Industrie, ajoute-t-il.

Snam Rete Gas est contrôlé à 50,07% par la compagnie pétrolière et gazière Eni , laquelle est détenue à 30% par l'Etat directement et indirectement.

Avec la libéralisation du marché, Eni est tenu de ramener ses parts à moins de 20% d'ici la fin 2008.

"C'était attendu. L'Etat se dote ainsi d'un droit de veto dans certains cas de figure, comme par exemple une OPA hostile", explique un analyste qui a demandé à ne pas être cité.

L'action Snam Rete grignote 0,16% à 3,6550 euros en fin de matinée, en ligne avec l'indice S&PMib , alors que l'indice MSCI du secteur des "utilities" abandonne 0,12% à ce stade.

Le décret prévoit que les pouvoirs spéciaux soient réexaminés tous les 5 ans.

L'Italie compte parmi les 17 Etats européens à qui la Commission européenne a reproché une nouvelle fois mardi des lenteurs dans l'ouverture des marchés du gaz et de l'électricité./VT

franck1968
Hydrogène
Hydrogène
Messages : 1430
Inscription : 05 nov. 2005, 10:29

Message par franck1968 » 17 avr. 2006, 22:36

Europe-Russie : plein gaz

L'année 2006 a commencé sous le signe de l'urgence énergétique. Etouffée par la dépendance en hydrocarbures vis-à-vis de la Russie, l'Europe recherche des solutions, entre énergies renouvelables et nouveaux partenaires.
L'Europe se souviendra du premier trimestre 2006 comme du moment le plus dur d'une crise énergétique inédite. Le 1er janvier dernier, la Russie fermait les robinets d'approvisionnement en gaz de l'Ukraine, limitant du même coup les ressources destinées à l'Europe. La sonnette d'alarme a aussitôt retenti : Vladimir Poutine envoyait un message très clair à Kiev mais surtout à une Union européenne, soumise aux politiques énergétiques de Moscou. Cette dépendance en hydrocarbures est le talon d'Achille géopolitique de l'UE car elle limite sa marge de manoeuvre au-delà de ses frontières orientales, dans une région tiraillée entre l'influence de Bruxelles et du Kremlin. Autour de la table des négociations, personne n'a fait réellement preuve de diplomatie : Poutine a tout misé sur son joker énergétique et l'Europe, qui en 2020 selon certaines estimations devrait importer jusqu'à 70% de son gaz, risque de se retrouver sur le carreau.

Une nouvelle stratégie communautaire

La réponse de l'Union européenne à cette urgence est contenue dans le Livre vert sur l'énergie, adopté en mars 2006. Les points clés du document ? La réduction d'énergie -qui devrait atteindre 20% de l'actuelle consommation d'ici 2020- grâce au recours aux biocombustibles et aux énergies renouvelables ou à la construction de centrales plus productives. Quant à la libéralisation du marché énergétique, les experts espèrent le développement d'un véritable réseau énergétique commun, en lieu et place des accords distincts signés entre nations. Ce réseau serait placé sous la houlette d'une institution nouvellement créée, l'Observatoire européen de l'approvisionnement énergétique.

Durant le Sommet européen du printemps 2006, les émissaires des 25 ont tous réaffirmé l'exigence de parvenir à une véritable politique énergétique commune afin d'améliorer l'efficacité de la production et de la consommation d'énergie ainsi que l'abandon du nucléaire. Malgré les directives communautaires édictées, le recours aux énergies alternatives reste marginal et la tentative de monter des groupes internationaux soumis aux règles de concurrence se heurte encore à la barrière des monopoles nationaux. Le face-à-face en mars 2006 entre le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso et Vladimir Poutine a d'ailleurs été décisif. Le leader russe a garanti sa « fidélité » en tant que fournisseur d'énergie tout en refusant de céder aux requêtes européennes : il n'a ni ratifié la Charte de l'énergie, un traité ayant pour objectif d'ouvrir le marché de l'énergie russe aux investisseurs européens -Gazprom, le géant gazier russe étant encore entre les mains de l'Etat-, ni accordé de concessions sur les gazoducs et oléoducs russes pour importer du gaz directement de l'Europe centrale. En clair, le locataire du Kremlin a lancé aux Européens un très abrupt « pas d'autres fournisseurs que la Russie ».

La longue route vers l'Est

L'Europe cherche aujourd'hui une issue de secours pour sortir des crocs de Poutine : nouveaux partenaires internationaux et nouveaux pipelines pour se fournir ailleurs en gaz et pétrole. Exemple de solution : la construction d'un gazoduc de 3 400 kms qui relie la partie sud ouest du continent à la mer Caspienne, le fameux projet Nabuco, devant contourner l'Ukraine et la mainmise russe. Les autres partenaires de Nabuco, le Kazakhstan, le Turkménistan et l'Ouzbékistan sont par ailleurs déjà courtisés par Poutine, qui leur promet depuis des années un « gazoduc de la mer Caspienne ». La domination russe ne risque pas de s'amenuiser aussi facilement. L'Allemagne, de son côté, travaille à la construction d'un gazoduc sous-marin d'une longueur de 1 200 km qui, traversant la mer Baltique, reliera directement le territoire allemand à la Russie. Le grand perdant de cet accord Moscou-Berlin ? La Pologne. Lech Kaczynski, l'actuel Président, a ainsi exprimé son mécontentement vis-à-vis du parcours emprunté par le gazoduc, jugeant le projet contraire « aux intérêts de la Pologne. Nous sommes les alliés de l'Allemagne, que ce soit dans l'OTAN ou dans l'UE. Alors pourquoi construire un gazoduc évitant notre territoire ? ».
Les réserves en gaz et pétrole de la mer du Nord vont elles aussi en diminuant alors que la consommation en hydrocarbures des Européens augmente d'1 à 2% par an. Les stocks présents en Europe représentent seulement 20 ans d'approvisionnement, et comme le carbone- connaissent des coûts d'extraction quatre voire cinq fois supérieures à la moyenne mondiale. Aveugles vis-à-vis de cette urgence, les Etats persistent à se battre entre eux afin de conserver de vieux monopoles. L'idée de repenser le marché de l'énergie est supplanté par les luttes hiérarchiques des anciens « seigneurs de la lumière ». Le risque encouru est pourtant connu d'avance : si le principe du « diviser pour mieux régner » régit la politique internationale, ces conflits internes constituent déjà un cadeau pour le « Tsar » Poutine.

franck1968
Hydrogène
Hydrogène
Messages : 1430
Inscription : 05 nov. 2005, 10:29

Message par franck1968 » 26 avr. 2006, 20:39

L'Europe souhaite et craint à la fois le rapprochement avec la Russie
11:50 | 26/ 04/ 2006

MOSCOU, 26 avril - RIA Novosti. Les problèmes actuels de Gazprom ont mis en évidence la déficience de la décision de la Russie de miser sur l'Union européenne en tant que principal partenaire commercial et économique, écrit le quotidien Biznes.

La "Vieille Europe" se met en quatre pour trouver un équilibre entre ses propres intérêts (très hétéroclites, d'ailleurs) et la dépendance envers son principal "patron" atlantique. Les Européens, impuissants à se doter de priorités nettes et claires, souhaitent et craignent à la fois le rapprochement avec la Russie.

Gazprom a déjà subi l'effet des appâts de la politique européenne des doubles standards: les tentatives de la grande société russe d'élargir sa présence dans le Vieux Monde se sont heurtées à une résistance acharnée des gouvernements de nombreux pays du continent. Après une série d'échecs en Italie et en Grande-Bretagne où Gazprom se proposait d'acheter des réseaux de distribution de gaz, il est devenu clair que pour s'introduire en Europe il ne suffit pas de disposer de réserves importantes de matières premières et de ressources financières considérables (que le géant gazier aime à mettre en vedette).
Les deux parties ont clarifié leurs positions respectives: la Russie n'accepte pas le régime discriminatoire d'accès aux marchés européens et s'irrite contre le tapage soulevé autour de la dépendance des livraisons de gaz russe, tandis que les Européens sont mécontents que Gazprom ait mis leurs sociétés à l'écart de la production de gaz sur le territoire de la Russie.

En réalité, aux craintes traditionnelles inhérentes aux relations entre fournisseur et consommateur on voit s'ajouter, dans notre cas, des aspects politiques. La Russie contemporaine ne suscite pas beaucoup de confiance chez les Européens. Le scandale gazier de janvier avec l'Ukraine a réchauffé le soupçon, qui couvait déjà en Occident, que la Russie pouvait utiliser les vannes pour faire pression sur ses partenaires.

Le scandale gazier qui a éclaté désavoue en fait le thème principal de la prochaine rencontre du G8 à Saint-Pétersbourg, en soulignant que la Russie et les sept autres membres de ce groupe ont une conception différente de la sécurité énergétique. Cependant, la coopération dans le secteur énergétique est la seule chose qui rapproche la Russie du club des Etats les plus industrialisés du monde.

Répondre